La vie des choses
En mai 2022, nous avions assisté à la présentation du livre « L’anomalie » de Hervé Le Tellier à l’Institut Français de Budapest. L’œuvre, récompensée par le prix Goncourt en 2020, présente sept personnages. Très brièvement résumé, ces personnages se dédoublent, ce qui conduit chacun à se rencontrer lui-même. Cette trame permet à l'auteur d'aborder les mystères psychologiques de la vie humaine. L’ouvrage est passionnant et sa lecture vivement recommandée.
Marc Agron vient de publier LA VIE DES CHOSES. Sa lecture nous plonge en peu dans la même atmosphère de mystère et d'approche psychologique. Ici le nombre des personnages principaux est plus réduit : un écrivain, son épouse, ses jumeaux, son éditeur et un ami. La quatrième de couverture présente le roman ainsi : « Yann Mendelec, écrivain célèbre, tombe dans l'oubli suite à l'échec de son dernier roman. À la recherche d'un style inédit, plus séduisant et contemporain, il souhaite reconquérir son public avec son nouveau livre ‘La vie des choses’. Louis Van Berg, son éditeur, devinant un bestseller qu'il refuse de voir entaché par les déboires de l'auteur, l'incite à un pacte infernal : publier son roman sous réserve de changer d’identité, en devenant Norga Abraham, écrivain mystérieux et inventé de toutes pièces. Dans un chassé-croisé avec Rosemarie, sa femme, entre Paris et New York, amour et abandon, mémoire et oubli, Yann Mendelec est la nouvelle figure romanesque de Marc Agron. Avec une intrigue originale autour du changement d'identité, il pose une question résolument actuelle et satirique : de quels sacrifices un homme est-il capable, aveuglé par son désir de célébrité ? ».
Ainsi donc, le besoin démesuré de reconnaissance conduirait à l'absurde abandon de soi. Drame shakespearien ? Non car Marc Agron utilise l'humour et l'érudition, assaisonnés d'imagination fertile.
Ses descriptions nous mettent de bonne humeur. Par exemple, l'effort de vente du roman qui cause la chute de Mendelec : « Ne pouvant l'écouler aussi facilement que prévu, l'éditeur l'avait d'abord soldé. Dans la boutique d'un hall de gare, il avait même été déposé à côté du rayon « alimentation et bricolage » et offert à l'achat d'un traité de cuisine moléculaire écrit par un chef étoilé, lui aussi en mal de lecteurs. »
Ou encore lorsqu’un libraire new-yorkais polyglotte dit : « (...) j'aime lire en français, juste pour m'exercer. Mais quelle langue compliquée avec toutes ces lettres pour un seul son ! Ils écrivent « l'eau » avec quatre lettres et une apostrophe ! Alors qu'ils pourraient écrire « lo ». Idem pour « aujourd'hui » ! Où sont-ils allés chercher l'orthographe de ce mot pour signifier today, oggi, hoy ? Mais leur littérature est grande ! Camus est un dieu pour moi, et j'ai lu tout Proust deux fois. Son univers est d'une drôlerie incroyable. »
A propos de littérature : dans sa déprime, l'écrivain creuse le trou dans lequel il se morfond en se comparant avec les auteurs célèbres qu'il trouve dans une précieuse bibliothèque que sa femme a héritée, Par ce biais, Agron (Norga ?) suggère aux lecteurs des titres à (re)lire.
Il est impossible de décrire, d'écrire les preuves de l'imagination de Marc Agron sans trahir le suspens du roman, aussi c'est la lecture du livre qui en apportera la preuve.
Bálint Géza (Valentin) Basilides