L’OEIL DE L'ARCHITECTE

L’OEIL DE L'ARCHITECTE

Laszlo Horvath

Rencontre avec le photographe Laszlo Horvath entre Paris et Budapest

À peine arrivée à Paris, j’ai rencontré l’auteur d’un livre fraîchement édité, un livre magnifique : Le Corbusier vu par Laszlo Horvath.

Laszlo Horvath a l’esprit créateur, qu’il s’agisse de ses photographies ou de ses films documentaires. Il nous fait découvrir quelques grandes personnalités du monde littéraire et artistique comme Roger Martin du Gard, Jacques Copeau, ou Vera Molnar.

On connaît les images de Lucien Hervé : Le Corbusier vécu. Laszlo Horvath a pris le relais.  À travers son dernier livre, nous découvrons autrement l’univers de Le Corbusier.

Laszlo Horvath

JFB : Cher Laszlo, quel est le secret pour nous faire entrer dans cet univers ? 

Laszlo Horvath : En fait, il ne s’agit pas tellement de secret, c’est plutôt le hasard qui fait bien les choses. Il y a une quinzaine d’années, j’ai accompagné Vera Molnar au couvent de la Tourette où elle participait à une exposition. C’était le premier site Le Corbusier que j’ai visité et photographié grâce à un frère dominicain, historien d’art, ami proche de Vera, et qui est également devenu mon ami par la suite. 

Laszlo Horvath

Depuis, j’ai photographié six autres sites de l’architecte. L’année dernière, j’ai eu une exposition personnelle avec des images de l’ensemble de ces sites à la Maison La Roche à Paris, qui est aussi le siège de la Fondation Le Corbusier. L’idée du livre est née pendant cette exposition.

JFB : Quels sont les leitmotivs de votre livre, quels ont été vos choix en rédigeant ce livre?

Laszlo Horvath

L. H. :  J’aime beaucoup les formes géométriques en général et je dois dire que, dans l’œuvre de Le Corbusier, la géométrie est extrêmement présente. Cela donne d’ailleurs une forte unité à son œuvre, tout comme l’utilisation de la lumière naturelle, de l’ombre, et des couleurs.

L’autre aspect de mon travail est la recherche des détails, comme disait Kincses : « Quand le détail est le Tout. »  Avancer par élimination et ne garder que les éléments visibles nécessaires à la structure de l’image.

Laszlo Horvath

Ce n’est pas du minimalisme, c’est aller vers l’essentiel selon la définition du grand photographe Hongrois, André Kertész: « Simplifier, simplifier, simplifier. »

JFB : Comment arrivez-vous à saisir l’essentiel de l’univers de l’architecte avec vos images où les couleurs s’éclatent et les éléments créent une harmonie, où l’image devient une œuvre abstraite, autonome – comme disait László Beke?

L. H. : Une grande partie du travail s’effectue en post-production. Non pas pour chercher des effets, mais au contraire pour respecter le climat de la prise de vue en corrigeant essentiellement ce que les « anciens » corrigeaient également. C’est-à-dire la densité, la luminosité. Mais ce qui est essentiel dans mon travail, c'est la composition. Car le travail sur le cadrage permet d’éliminer, étape par étape, ce qui n’est pas nécessaire à la structure que je recherche. Ainsi, petit à petit, une nouvelle image - autonome se met en place, en allant souvent vers l'abstraction, comme disait László Beke.

Laszlo Horvath

JFB : On cite souvent les œuvres de Le Corbusier, comment il a pu contribuer au mieux-être des gens dans leur habitation. Il a d’ailleurs révolutionné les habitats. Quels étaient vos sentiments lors des prises de vue de la Cité radieuse de Marseille et celles de la Maison La Roche à Paris, par exemple ?

L. H. : Le Corbusier a été très préoccupé par l’idée de ce qui était nécessaire, utile, pratique dans une habitation. Il pensait que les couleurs, les lumières, et les ombres influençaient l’esprit. Dans ses appartements en longueur du nord au sud, il y avait toujours du soleil à un moment de la journée – par beau temps, bien entendu... Et il faut voir le rôle des couleurs dans les longs couloirs de la Cité radieuse qui rendent vivants, magnifiques, ces lieux sans véritables sources de lumière extérieure – sinon les petites lumières électriques qui signalent l’entrée des appartements. Ou alors à la Maison La Roche où il a construit une galerie d'exposition avec une rampe qui permettait à Raoul La Roche de voir sa remarquable collection de tableaux selon plusieurs niveaux différents et grâce aux multiples éclairages naturels.

Propos recueillis par Éva Vámos

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