La Hongrie, paradis des footballeurs ?

La Hongrie, paradis des footballeurs ?

La Hongrie, paradis des footballeurs ?

Ce n´est un secret pour personne : le Premier ministre hongrois Viktor Orbán est un grand adepte du ballon rond. Ce que nous ne saurions lui reprocher en soi. Lui-même n´a pas négligé, par le passé, de fouler les pelouses, jouant même en championnat, avec un certain succès, d´ailleurs. Jusqu´à son fils Gáspár qui avait un moment rêvé de faire carrière, jouant un temps dans une équipe professionnelle. Projet aujourd´hui abandonné.

A cela, rien à redire. Sauf que… Aimer et pratiquer un sport est une chose. Mais… faire usage de son pouvoir pour favoriser la branche de façon excessive, il y a un pas que le Premier ministre hongrois a franchi allègrement.

Jugeons-en : dégrèvement fiscal sur le traitement des joueurs professionnels jusqu´à 500 millions de forints annuels (1) (alors que le salaire minimal est imposé à 15%.). A quoi s´ajoute la construction frénétique de stades qui poussent un peu partout, comme champignons après la pluie : 32 stades en dix ans pour un montant de 350 milliards de forints (plus d´un milliard d´euros) (2). Souvent luxueux, comme celui édifié dans sa commune d´enfance (Felcsút) avec sièges et pelouse chauffés. Un stade au demeurant fort beau, mais contenant 3 800 places dans une bourgade comptant moins de 1 800 âmes…. Sans parler du financement à outrance des clubs (qui dépasse celui de la culture) avec, à relever au passage, une enveloppe particulièrement juteuse remise au club de sa jeunesse (Académie Puskás).

Si au moins cela se justifiait par de brillants résultats… Jugeons-en : positionnée en 47ème place mondiale dans le classement officiel de la FIFA, la Hongrie, sauf erreur, n´a pas participé à une Coupe du Monde depuis 1982. Par ailleurs, la Mannschaft magyare peut se vanter d´avoir réalisé le rarissime exploit de se faire battre par… Andorre (... il y a déjà plusieurs années, il est vrai). Au point que le public désaffectionne les stades avec une moyenne d´à peine plus de 2000 spectateurs par match pour la province. Il est vrai, avec une fréquentation plus suivie à Budapest.

La Hongrie, paradis des footballeurs ?Tel ce match organisé la semaine dernière dans la capitale entre les deux équipes locales vedettes du championnat. Un derby qui a rassemblé près de 16 000 spectateurs. Certes, contrôlés à l´entrée, mais une fois installés sur les gradins, se serrant comme des sardines et ôtant pour beaucoup leur masque. Alors que la femme Médecin en chef du pays passe son temps à nous seriner qu´il faut éviter à tout prix foules et rassemblements. Deux poids, deux mesures ?

Il est loin, le temps des Puskás, Kocsis et autres Bozsik et de ce „Onze d´Or” (Aranycsapat), champion olympique en 1952 et finaliste malheureux de la Coupe du Monde en 1954. Des joueurs qui, soit dit en passant, étaient - du moins avant leur départ pour l´étranger - mille fois moins gâtés que leurs successeurs d´ aujourd´hui. Et pour quel résultat… Alors que les hôpitaux, pour beaucoup endettés, manquent cruellement de fonds. Pour ne citer que ce cas...

Alors ? Le problème est que tout cela se paie sur les petits sous du contribuable. Pour permettre à notre héros d´assouvir sa passion. Certes, comme il le clame, il faut encourager les jeunes à pratiquer le sport. Oui. Mais ce n´est pas en construisant à tous vents de grands beaux stades qu´on les y incitera. Pour cela, il vaudrait mieux multiplier un peu partout les simples terrains de sport, ce qui serait nettement plus efficace et moins coûteux.

Conclusion ? Dommage que le pays ne soit pas dirigé par un mélomane, un passionné de littérature ou un mordu de théâtre…. Mais bon ça viendra peut-être un jour, qui sait ? Ne désespérons pas….

Pierre Waline

(1): 1 euro = 350-360 forints (280 forints il y a dix ans).

(2): source, hebdomadaire Blikk.

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