CINEMA: La Semaine du Film Hongrois

CINEMA: La Semaine du Film Hongrois

Si à l'heure où nous mettons sous presses, le palmarès de la 40e Semaine du Film Hongrois n'est pas encore connu, cette édition anniversaire s'avère pourtant déjà un bon cru. Avec 101 films répartis en 5 catégories (longs et courts métrages, documentaires, films scientifiques et production télévisuelle), ce festival est devenu au fil des ans le rendez-vous incontournable du cinéma hongrois.

 

Sur les 18 longs métrages en lice pour le prix du meilleur film 2009, 7 sont des premiers films. D'autres étaient quant à eux attendus avec impatience. C'est notamment le cas de Adás (Transmission), le nouveau film de Roland Vranik, auteur du très remarqué Fekete Kefe (Brosse noire) en 2005, ou encore du nouvel opus de György Palfi, découvert avec Hukkle (2002) et confirmé au rang de jeune talent du cinéma hongrois avec Taxidermia en 2006.

Son nouveau long-métrage, Nem vagyok a barátod (Je ne suis pas ton ami), est le second volet d'une trilogie intitulée Paradis-Purgatoire-Enfer. Sa projection est donc précédée du soi-disant Paradis, un document filmé de 13' intitulé Nem leszek a barátod (Je ne veux pas être ton ami). Réalisé dans un jardin d'enfants, ce film suit des bambins de 3-4 ans dans ce monde de jeux, de joies mais aussi de violence sourde et de pleurs. Le leitmotiv de leurs discussions, ou tout au moins ce qu'en a gardé le montage, tourne autour de ce noeud émotionnel: je suis ou je ne suis pas ton ami. Un postulat qui change, au fil des jours, au gré des humeurs et du bon vouloir de ces jeunes protagonistes. Générique. Deuxième film.

Les enfants sont devenus grands mais l'on retrouve les mêmes ingrédients: jeux, joie, violence – cette fois beaucoup plus crue et assumée, et pleurs... Filmé avec des acteurs amateurs, le film est construit comme un vaste vaudeville (l'humour en moins) où les personnages, qui ne semblent à première vue n'avoir rien à faire les uns avec les autres, se croisent, s'aiment, se trahissent et se déchirent. L'enfer c'est les autres, écrivait Sartres, et l'on peut avancer que les habitants du paradis et du purgatoire de György Pálfi ont en quelque sorte déjà un pied dans l'enfer ici-bas.

L'enfer décrit par Roland Vranik dans Adás (Transmission) est d'une toute autre nature, mais sa tension non moins palpable. Présenté comme une « tragicomédie absurde dans un monde anti-utopique », ce film met en scène un monde où tous les écrans ont cessé de fonctionner. Les téléviseurs ne transmettent plus leurs programmes, les moniteurs sont vides et la totalité de l'industrie des télécommunications a été réduite à néant. Il n'y a même plus d'électricité. Le paradis? Pas pour les personnages que nous suivons et dont certains, drogués d'images, sont par exemples victimes d'insomnie (tant ils étaient habitués à s'endormir devant leur écran) et ont désormais recourt à d'autres drogues. C'est le cas de l'un des trois personnages principaux de cette étrange fiction qui se déroule dans un décor de péplum des temps modernes. Dans ce paysage de bord de mer, aux vastes villas modernes désertées par leurs habitants, le temps semble s'être arrêté pour le plus grand malheur de certains et la quiétude des autres. Le plus jeunes des trois frères rencontrera l'amour en ces temps de chaos qui pourraient être si sereins si un drame n'était survenu. Ce n'était qu'un accident, une dispute de couple... Mais couvert du voile du mensonge, ce meurtre ternit ce paysage magnifique de mer d'huile et sa lumière éclatante qui accentue les ombres et la noirceur des âmes. Véritable tragédie grecque, le film décrit des destins marqués par le sceau du crime et laisse un goût amer que nous savions inéluctable.

Frédérique Lemerre

 

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