Une réputation d’excellence
L’Orchestre du Festival de Budapest
L’Orchestre du Festival de Budapest est un jeune orchestre, avec près de trente saisons musicales à son actif. Et pourtant, il est aujourd’hui un des meilleurs au classement de la revue Gramophone et est invité dans les salles et manifestations les plus prestigieuses partout dans le monde. Tamás Körner, directeur depuis 20 ans de cet orchestre renommé, répond aux questions du JFB.
JFB : Quelle est l’histoire de cet orchestre ?
Tamás Körner : L’Orchestre du Festival de Budapest a été créé en 1983 par Zoltán Kocsis et celui qui est encore aujourd’hui son directeur artistique, Iván Fischer. Toutefois, pendant ses treize premières années de vie, l’orchestre n’a pas eu de fonctions permanentes. Il ne jouait que 3-4 fois par an. Le but de l’orchestre était déjà d’organiser ces quelques événements musicaux en Hongrie, mais avec un niveau d’exigence et de qualité très élevé. Après le changement de régime politique, il a pu obtenir un statut normal avec des programmations par saison, des abonnements, ...
JFB : Justement, l’Orchestre du Festival de Budapest bénéficie d’un statut privé. Est-ce courant pour ce type d’orchestre ?
T.K. : Non, c’est assez exceptionnel, et ça l’était encore plus à l’époque, sous le régime communiste. Cette initiative avait eu en 1983 un fort retentissement. Elle était très symbolique. Hormi aux Etats-Unis, où l’on trouve plus couramment ce type de statuts pour de grands orchestres, en Europe la plupart des orchestres sont des entités publiques.
JFB : Par conséquent, quelles sont les sources de financement de cet orchestre ?
T.K. : Elles sont multiples. D’une part, l’Etat et la municipalité de Budapest participent à son financement à hauteur de 45%. Malheureusement, pour 2011, l’Etat et la municipalité ont dû revoir à la baisse (-20%) le niveau de leur subvention. D’autre part, la Fondation de l’Orchestre du Festival de Budapest, créée en 1992, reçoit des dons privés qui permettent de financer les 55% restant de notre budget. La fondation permet ainsi à l’orchestre de maintenir son niveau international. Enfin, nous avons créé plus récemment des cercles d’amis qui organisent des galas de soutien à notre orchestre. On en trouve aujourd’hui aux Etats-Unis, en Autriche, en Allemagne, en Angleterre.
JFB : Comment se répartissent les concerts à Budapest et à l’étranger ?
T.K. : L’Orchestre du Festival de Budapest donne chaque saison une quarantaine de concerts à Budapest, avec 3-4 représentations en Province également (Pécs par exemple en décembre) et se produit une cinquantaine de fois à l’étranger dans les salles et festivals les plus prestigieux : New York (Carnegie Hall, Avery Fisher Hall), Chicago, Los Angeles (Hollywood Bowl) Vienne (Musikverein, Konzerthaus), Paris (Salle Pleyel, Théâtre des Champs-Elysées), ...
JFB : Qu’est-ce qui fait que l’Orchestre du Festival de Budapest a aujourd’hui cette réputation d’excellence à travers le monde ?
T.K. : C’est vrai que la question se pose, d’autant plus que cet orchestre est encore un «bébé» comparé à d’autres grands orchestres dans le monde dont l’existence est beaucoup plus longue, parfois plus de 150 ans comme pour l’Orchestre philharmonique de New-York. Aujourd’hui, de nombreux experts le considèrent cependant comme un des orchestres les plus importants au monde. Il y a plusieurs raisons à ce succès : son directeur artistique, Iván Fischer en est la première raison. Cet homme talentueux est avant tout un excellent pédagogue. Il dirige la plupart des concerts à Budapest et aussi l’ensemble des concerts donnés à l’étranger. Une autre raison, est la méthode utilisée pour gérer cet orchestre et qui se distingue de nombreux autres orchestres.
JFB : Pouvez-vous nous livrer les «secrets» de cette méthode performante ?
T.K. : La structure elle-même de l’orchestre, tout d’abord, a pour but d’éviter toute sorte de routine, et au contraire d’être dans une dynamique constante. Ainsi, les contrats de nos musiciens sont sur 2 ans, renouvelables chaque fois au terme du contrat. Cela nous permet de recruter régulièrement de nouveaux jeunes talents et cela incite en même temps les musiciens à se remettre en cause et à chercher en permanence à s’améliorer. Une autre méthode employée consiste à inviter dans nos concerts 5 à 8 musiciens étrangers. Les membres de l’orchestre sont également invités à changer de place régulièrement : un violoniste peut occuper par exemple le premier rang pour deuxièmes violons, puis le deuxième rang pour premiers violons. Cela évite d’installer des habitudes entre musiciens et génère de la diversité, clé de la qualité et du succès. En outre, on offre régulièrement la possibilité aux musiciens de se produire comme soliste. C’est souvent pour eux une chance inouïe car dans un cadre normal ils devraient attendre toute une vie pour jouer dans ces conditions. Chaque année, les membres de l’orchestre peuvent participer à un concours qui permet aux vainqueurs de se produire la saison suivante en solistes. Une centaine de méthodes sont ainsi utilisées pour donner à cet orchestre une fraîcheur constante, une réelle dynamique, avec un niveau d’excellence toujours renouvelé.
JFB : L’orchestre fait-il des enregistrements ?
T.K.: Oui, depuis 2003, l’orchestre a signé un contrat avec le label hollandais «Channel Classics» et enregistre chaque année trois à quatre disques. Il a remporté déjà plusieurs prix prestigieux (Grammy Award, Gramophone award) grâce à ces enregistrements.
JFB : Quels sont vos souhaits pour l’avenir ?
T.K. : De conserver bien entendu notre position à l’échelle internationale et de garder notre public très fidèle à Budapest. Mais, pour l’ensemble de l’orchestre, l’objectif principal est avant tout de préparer au mieux le concert suivant, que ce soit à New-York ou dans une ville de la province hongroise.
Gwenaëlle Thomas
Pour plus d’informations, veuillez consulter le site internet de l’Orchestre du Festival de Budapest : www.bfz.hu