Une faillite sanitaire, économique ou politique?
HospInvest
L'entreprise HospInvest est menacée de faillite et c'est toute la logique de privatisation du système de santé qui est remise en question. Retour sur l'histoire d'un fiasco annoncé.
L’entreprise internationale HospInvest, fondée au tournant du millénaire, est aujourd’hui présente dans une dizaine de villes en Hongrie et offre des soins médicaux à près de 500.000 personnes. HospInvest est actuellement le plus grand prestataire de services sanitaires et gère cinq hôpitaux, à Kiskunhalas, Hatvan, Parádfürdô, Gyöngyös et Eger, ainsi que des centres de santé, notamment à Százhalombatta, Jánoshalma, Kecel et Kiskôrös. La société dispose de financements permanents de la part de la caisse de la Sécurité Sociale (OEP). Jusqu’à une époque récente, la Banque européenne de Reconstruction et de Développement était propriétaire de HospInvest à hauteur de 30%. Mais avec l'interruption des réformes de santé, celle-ci a décidé de vendre ses actions. Depuis ses débuts, l’activité de HospInvest suscite un grand intérêt car, depuis le changement de régime, la privatisation du secteur de la santé reste une question ouverte qui n'a pas encore fait l'objet d'un compromis acceptable. Les partis politiques sont d’accord sur le fait que le secteur de la santé affronte de grosses difficultés financières et qu'il connaît un déficit chronique, sans pour autant avancer des propositions concrètes quant à son financement. Depuis ses débuts, HospInvest a affiché sa volonté de fermer certains services hospitaliers et de moderniser les équipements médicaux. Il s'était en outre engagé auprès des municipalités qui cédaient à l'entreprise leur droit de gestion des hôpitaux, leur promettant plusieurs milliards de bénéfices, ce qui est loin d'être le cas à l'heure actuelle.
Si de nombreuses privatisations ont été réalisées sans encombre, la cas de l'hôtipal de Eger a été plus houleux. HospInvest a pris la direction de l’hôpital et du centre de Santé Ferenc Markhot de Eger le 1er novembre 2008, déclenchant une grève sans précédent au sein de l'établissement qui s'est renforcée au fil des jours, entraînant un véritable débat politique sur la question des privatisations. Le 25 mars dernier, le conseil général de la région de Heves, dirigé par les socialistes, a pourtant ratifié le contrat en vertu duquel HospInvest prendrait la direction de l'hôpital pour les vingt prochaines années. Une décision justifiée par le mauvais état de l'hôpital, que la municipalité n’a pas les moyens d'entretenir et de mo-derniser. Jusqu'au bout, l'opposition a accusé la région d'avoir établi un appel d'offre sur mesure pour HospInvest qui, selon eux et au regard du bilan de l’entreprise, est incapable de tenir sa promesse de développement de 6 milliards de HUF, d'autant plus qu'une des branches de l’entreprise est d'ores et déjà en cessation de paiement. Des organisations civiles et des associations défendant les intérêts des employés ont plusieures fois protesté contre la privatisation fonctionnelle de l'hôpital, soulignant en outre que la couverture médicale de la région ne saurait être assurée de façon satisfaisante. Ainsi l’Association des Défenseurs des Hôpitaux d’Eger a-t-elle été créée – et, politiquement, se trouve être plutôt liée à l'opposition. Entre-temps, le Tribunal Départemental de Nógrád a invalidé le contrat conclu entre la municipalité et HospInvest dans son jugement de première instance, se référant à un vice de procédure.
A l'heure actuelle, HospInvest est endetté envers plusieurs transporteurs et médecins, mais la presse relayait depuis 2007 l'initiative prise par le laboratoire pharmaceutique suisse Roche pour engager des poursuites judicaires à l'encontre de HospInvest. L'entreprise doit par ailleurs plusieurs centaines de millions de HUF à ses distributeurs d'énergie. En outre, il y a quelques jours, la banque CIB a entrepris d'investir tous les financements accordée par l’OEP au remboursement des dettes d'HospInvest, qui a fait une demande de protection contre la faillite.
L'entreprise s'est lancée dans une tentative de restructuration pour laquelle elle négocie notamment la participation d'investisseurs professionels. Le conseil général de Heves a décidé de ne reprendre la procédure de mise em faillite qu’après le 31 juillet.
Les malades sont toutefois les principales victimes de la division des professionnels de santé et restent incertains face à l'avenir de leur traitement et de leur suivi médical. De plus, ils ne savent plus qui croire et que penser: la privatisation de la santé publique est-elle vraiment un mal nécessaire?
Beáta Szathmáry
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