Une conception dans le flou
Le quartier Andrássy
Le gouvernement envisage de créer un axe culturel regroupant un ensemble de musées vers la place des Héros, alors que les institutions culturelles sont en même temps menacées de restrictions budgétaires.
Sur le calendrier du Musée des Beaux-arts mis en ligne, ne figure aucun programme après le mois de mai. Cette institution aurait dû fermer ses portes pendant toute la période d’été pour cause de travaux d’agrandissement. Les employés devaient toutefois réfléchir aux expositions qui auraient pu être accessibles pendant cette période. Cependant, le gouvernement a récemment déclaré qu’il supprimait les subventions pour ces travaux. Parallèlement, le Secrétaire d’État aux Affaires culturelles, Géza Szőcs, a expliqué lors d’une conférence de presse que le gouvernement souhaitait élaborer un axe culturelle entre le le château de Buda et le Bois-de-ville, avec un nouveau quartier culturel portant le nom d’Andrássy, sur la place Felvonulási. Par conséquent, les travaux prévus au Musée de Beaux-arts sont remis en cause. «Le Quartier Andrássy ne constitue pas une entrave au Musée des Beaux-arts» a souligné Géza Szőcs. Le quartier abriterait d’ailleurs, parmi plusieurs musées, un nouveau bâtiment du Musée des Beaux-arts. La Galerie Nationale, actuellement située au château, et le Musée Folklorique pourraient également s’installer dans ce nouveau site, et cohabiteraient avec de nouvelles institutions comme un musée national de photographie.
Projet visible ou obsolète ?
On peut obtenir très peu d’éléments aujourd’hui sur la conception de cet ensemble culturel. A vrai dire, ce projet semble encore flou et pas forcément cohérent. En effet, on comprend difficilement pourquoi le gouvernement souhaite installer un pont piétonier entre les ponts Petôfi et Lágymányosi, puisque le futur «axe culturel» s’allonge jusqu’au château. L’architecte, à l’origine de ce pont piétonnier budapestois, József Finta, soutient pourtant l’idée, car selon lui, «Budapest n’a pas vocation à devenir un centre politique ou économique, seul l’aspect culturel permettra à la capitale hongroise d’obtenir une vraie visibilité à l’intérieur mais aussi à l’extérieur du pays». Le Museumsquartier de Vienne, construit il y a dix ans, a d’ailleurs connu un grand succès en accueillant également cafés et restaurants, et temporairement des festivals. Cependant le directeur de l’institut de l’histoire d’art de l’université ELTE, András Rényi, a affirmé dans un débat organisé sur ce thème que représenter la Hongrie uniquement à travers ce quartier culturel est une idée obsolète. Le Museumsinsel de Berlin, qui sert de référence au gouvernement hongrois, est né pendant la période de l’Empire Allemand comme symbole de la nation. Cette idée est-elle crédible aujourd’hui?
Le directeur de l’urbanisme de la ville de Budapest, György Kerekes, a critiqué sur le site Origo, l’absence de négociations sur ces plans, son service n’ayant pas été sollicité. Il a également exprimé ses doutes sur la présentation du projet au public, sans aucune connaissance précise des coûts et de manière générale sans détails concrets. Le maire István Tarlós avait déjà rendus publics des plans sur un quartier culturel semblable avant les élections municipales. Cependant il souhaitait l’installer derrière la Gare Nyugati où le gouvernement Gyurcsány avait déjà envisagé un centre gouvernemental qui n’a finalement jamais été construit.
A quel prix?
L’annonce de ce quartier culturel a été faite à un moment où la mairie et le gouvernement envisagent des restrictions budgétaires pour le secteur culturel. Les principaux musées budapestois toucheront une subvention publique inférieure de 12 à 13% à celle de l’année précédente. La Galerie Nationale et le musée Ludwig envisagent de se serrer la ceinture. Les salaires des employés, mais aussi les recherches engagées par ces musées vont donc s’en ressentir.
Le Secrétariat d’État aux Affaires culturelles souhaite que la conception de ce quartier soit définitivement définie d’ici la fin de cette année. Les possibilités (ou non) d’agrandissement du Musée des Beaux-Arts devraient être confirmées à la même période. Les fonds européens s’élevant à 3,5 milliard forints ont été affectés dans un premier temps à l’agrandissement du Musée des Beaux-arts, le délai ultime de réalisation étant fixé à 2013. Cette somme n’a pas vocation a être affectée exclusivement à ce projet. Toutefois la contrainte du délai doit être respectée et le projet doit impérativement servir le développement touristique – a remarqué le directeur du musée László Baán. L’aménagement du quartier devrait s’étaler sur 10 ans selon les estimations.
Il semble peu probable qu’un tel complexe puisse être réalisé avec un budet de 3-4 millliards de forints. Les coûts du centre gouvernemental ont été par exemple estimés à 140 milliards de forints et devaient être couverts en grande partie par des subventions d’Etat, provenant notamment des 110 milliard de forints de la vente des bâtiments ministériels. Un tel montant est inenvisageable pour le projet actuel, au vu de la situation économique. On se demande aussi comment le musée Néprajzi ou le château, aujourd’hui inoccupés, peuvent être intégrés à ce projet sans faire l’objet de travaux importants.
Judit Zeisler