Tendances
L’attentisme reste de rigueur jusqu'en 2011
Les prévisions concernant l’économie hongroise sont plutôt positives. Si presque personne ne s’attend à un retour de la croissance en 2010, la plupart des analystes situent la reprise entre le début du deuxième semestre de 2011 et le début de l’année 2012. Néanmoins la récente flambée de populisme et les graves problèmes structurels qui persistent pourraient avoir des conséquences particulièrement négatives.
Un certain optimisme
Alors que s’amorce une légère reprise au niveau de la zone euro, tous les analystes saluent le courage des Hongrois dans leur lutte contre le déficit et s’accordent à penser que le gouvernement hongrois n’aura pas à changer de politique et atteindra ses objectifs budgétaires. Le plan d’austérité, même s’il est impopulaire et difficile à supporter pour une majorité de Hongrois, devrait se révéler un atout au moment où la Hongrie sortira de la crise. Il pourrait même, selon certains, se révéler un véritable booster pour la croissance.
Il semble aussi que tout le monde considère que les lignes de crédits ouvertes par la Hongrie ne représenteront pas, en pourcentage du PIB, une part plus considérable que celle des autres pays de l’Union et que, finalement, ce recours à l’emprunt se révélera une bonne chose. Pour certains analystes américains, la Hongrie ne tombera pas plus bas et ces lignes de crédit, qui ne seront semble-t-il même pas toutes utilisées, représentent une «aide à la survie» suffisante dans les circonstances actuelles.
Pour la Banque centrale de Hongrie et les autres observateurs institutionnels, y compris les nôtres, les crash-tests qui ont été effectués sont satisfaisants et permettent de considérer que le système bancaire hongrois est solide et qu’un effondrement n’est pas à craindre. Même si ces derniers temps les banques ont mis sur le marché immobilier un nombre plus important de propriétés qu’à l’accoutumé, du fait de défauts de paiement, cette situation ne semble pas inquiéter outre mesure les spécialistes.
Pour 2010, les pronostics vont d’une baisse du PIB d’environ 1 % pour les institutionnels à une hausse de 0,5% pour l’analyste privé le plus optimiste. Bien sûr, ces pronostics sont indicatifs puisque, comme la crise nous l’a montré, les prévisions ne se réalisent que lorsque aucun événement imprévu ne survient, ce qui ne se produit quasiment jamais.
Néanmoins, souvent en se basant sur un redémarrage de l’économie allemande, redémarrage qui a commencé mais dont on ne sait s’il se poursuivra, une majorité d’analystes envisage un retour à la croissance dés le septième mois de 2011, pour le plus optimiste, d’ici la fin 2011 pour le gros du peloton et en 2012 pour les plus pessimistes.
Ces opinions convergentes sont celles des divers économistes qu’emploient les plus grandes institutions et les banques privées. Il existe néanmoins un certain nombre de bémols qu’à mon grand regret je me dois de vous communiquer.
Des problèmes récurrents
Comme le soulignait pudiquement un chef d’entreprise en évoquant l’économie parallèle, la corruption, les antagonismes politiques stériles et le retour du nationalisme, il existe des «problèmes structurels» qu’il faudrait résoudre.
L’économie parallèle, dénoncée par les chefs d’entreprise étrangers, a pour corollaire l’absurdité du système fiscal hongrois qui décourage l’esprit d’entreprise et étouffe les talents de demain. La critique du système fiscal est unanime et la justification de cet état de fait tient du célèbre «qui de l’oeuf ou de la poule...». Pour le moment, on ne connaît pas avec précision les projets du Fidesz en la matière. Comme ce parti est donné gagnant pour les prochaines élections législatives en 2010, les composantes d’une possible réforme du système devraient apparaître dans les mois à venir.
Ce pronostic de l’arrivée au pouvoir du Fidesz inquiète certains investisseurs qui y voient le symptôme d’une certaine hostilité aux entreprises étrangères. Il est pourtant fort probable que les quelques déclarations destinées à séduire un électorat extrémiste ne recouvrent pas d’intentions réellement belliqueuses. Néanmoins, comme le soulignait The Economist, ces déclarations ajoutées aux évènements de Pécs (affaire Suez) laissent une large place au doute.
Dans un autre ordre d’idées, aux conséquences identiques, la décision de la Cour suprême de Hongrie sur le projet de parking à Sopron n’est pas plus rassurante pour les investisseurs.
Même si tous les partis politiques ont le désir de voir ce pays se moderniser et changer, il n’est pas question de se mettre d’accord. Chacun se définit, avant tout, comme le contraire de l’autre. Etonnamment, cet antagonisme stérile connaît de rares exceptions, comme le récent problème de l’attribution de fréquence pour les radios privées pour lequel les deux partis ennemis parvinrent à se mettre d’accord pour évincer les deux radios aux mains d’investisseurs étrangers, ce qui n’était pourtant pas le consensus le plus urgent à trouver!
Enfin, la corruption, qui reste le problème le plus criant car il aboutit concrètement à une véritable négation de l’Etat de droit, est partout malgré le soit disant «blanchiment» de l’économie. Selon l’institut d’études Political capital, un milliard et demi d’euros disparaîtraient chaque année des fonds publics en Hongrie. Que ces chiffres soient exacts ou non, la corruption existe dans des secteurs où elle représente un danger pour la démocratie et il faut que cela cesse si l’on veut qu’un jour la Hongrie mérite son statut d’Etat de l’Union européenne. Actuellement, même si les partis politiques parvenaient à se mettre d’accord sur une loi viable, il est probable que l’application de cette même loi serait difficile voire détournée de son objectif premier.
De fait, le problème de la Hongrie n’est pas vraiment économique, politique ou moral, c’est avant tout un problème humain. Comme le résumait avec beaucoup de justesse le directeur financier hongrois d’une entreprise allemande: «L’économie hongroise souffre principalement de la crise financière, non pas du fait du déficit budgétaire ou du manque de réformes structurelles, mais du fait de l’absence totale de collaboration et de compréhension à tous les niveaux de la société. Si la seule loi qui s’impose est celle du «chacun pour soi», la Hongrie ne sortira jamais de cette crise et sera toujours comme une malade chronique qui se sent mieux de temps en temps mais ne se remet jamais. Il est vraiment temps que tout le monde assume ses responsabilités et n’attende pas que les autres fassent le premier pas».
Xavier Glangeaud
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