Tendances

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Le marché de l’art hongrois reste encore relativement replié sur lui-même. Une tendance qui évolue lentement mais sûrement, comme nous l’explique Délia Vékony, historienne de l’art.

La Hongrie compte environ 200 collectionneurs d’art contemporain, sans compter les entreprises. Leur nombre exact est toutefois difficile à mesurer car beaucoup d’entre eux préfèrent rester discret et ne pas étaler leur richesse patrimoniale au grand jour. En effet, les prix de vente des œuvres d’art hongroises ne sont pas si bas en Hongrie, même si les artistes qui parviennent à vendre à l’international pratiquent pour ce marché des tarifs encore plus élevés.

Le marché de l’art hongrois est longtemps resté relativement exclusif et les collectionneurs préféraient acquérir des œuvres d’artistes hongrois avant que certains ne prennent conscience que leur ouverture et la reconnaissance de leurs collections au-delà des frontières auraient un effet bénéfique pour la cote des artistes qu’ils soutiennent. Parmi les grands noms collectionnés en Hongrie on peut notamment citer les peintres István Nádler, László Fehér, Tamás Hencze ou encore les sculpteurs Miklós Melocco et Pál Kô. La tendance semble favoriser l’art figuratif, comme le démontre le succès grandissant des toiles d’Ákos Birkás, tout d’abord abstrait avant de tendre vers la figuration. Une évolution qui accompagne en somme les tendances du marché de l’art international. Figuration, huile sur toile, les règles ne sont toutefois pas aussi figées puisque certains grands collectionneurs hongrois préfèrent les œuvres abstraites, comme Lajos Barabás qui aime les figures géométriques et collectionne également l’art minimaliste mais aussi les bijoux d’artistes décoratifs.

La situation évolue pourtant avec une nouvelle génération d’artistes, plus jeunes et guidés par des galeristes avec lesquels ils espèrent bien souvent s’envoler pour les incontournables manifestations internationales d’art contemporain, comme celle de Bâle – Art Basel – pour ne citer qu’elle. Or, pour exposer à Bâle ou dans d’autres salons, il est incontournable de travailler avec des galeries, ce qui est relativement nouveau en Hongrie. En effet, même s’il existait d’autres moyens pour vendre ou acheter des œuvres d’art avant le changement de régime – comme le Képcsarnok où l’on trouvait de tout, de l’antique au contemporain en passant par le kitch, les nouvelles galeries apparues sur le marché après 1990 avaient pour ainsi dire tout à apprendre, ce qu’elles ont fait progressivement les 10 ou 15 premières années. Aujourd’hui, certains noms tirent leur épingle du jeu et font connaître leurs artistes à l’étranger. C’est le cas de la Galerie Deák Erika, la Galerie ACB, mais aussi Viltin Galéria ou Kisterem, quand d’autres travaillent encore exclusivement pour le marché hongrois.

La crise économique a eu un impact important sur le marché de l’art hongrois. Si les collectionneurs continuent de collectionner, ils sont plus prudents, plus réfléchis aussi, et négocient souvent les prix à la baisse tout en ayant tendance à acquérir des valeurs sûres. Mais de manière général, la tendance qui veut que les collectionneurs hongrois se tournent plus volontiers vers les artistes hongrois reste vraie. C’est sans doute l’effet d’une approche quelque peu “patriotique” de l’art, souligne Délia Vékony, qui évoque toutefois quelques contre-exemples, comme le couple Zsolt Somlói et Katalin Spengler qui a récemment acheté une céramique de l’artiste anglais Grayson Perry (couronné du Turner Prize) ou encore László Gerô, le directeur de Candy Hoover, qui a rassemblé de nombreux peintres allemands et suisses au sein de sa collection d’art contemporain. Ces derniers sont très actifs sur le marché de l’art, ils voyagent beaucoup et se tiennent au courant des tendances du marché international. Si cela ne tenait qu’à cela...

Frédérique Lemerre 

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