Spécial anniversaire: le gouvernement Antall
Le 23 octobre 1989 a été une date importante dans la vie de tous les Hongrois, lorsque Mátyás Szûrös proclama la troisième République, dont il est devenu le Président transitoire jusqu’au premier mai 1990.
Pendant cette période, l’Etat a changé non seulement le régime, mais aussi l’ordre social établi. On est passé d’une forme d’Etat donnée à une autre forme, et ce sans révolution. Le changement a été provoqué par une crise économique et politique. Dès 1989, la Hongrie entre dans l’économie de marché.
Il est important de mentionner que la nouvelle forme d’Etat est la République, et non plus la République populaire. Ce nouvel Etat hongrois est ainsi devenu indépendant et démocratique.
Avec le changement de régime, on a ainsi pu organiser, après 43 ans, les première élections législatives démocratiques, et c’est József Antall, le président du parti MDF (Magyar Demokrata Fórum – Forum des Démocrates Hongrois) qui, à une forte majorité, a été élu Président de la République.
Le MDF n’était pas un parti historique mais un mouvement social. Pour Antall, la décision a été difficile d’accepter d’être le candidat de ce mouvement car il ne voulait pas que ce mouvement devienne un parti parlementaire. Mais bien évidemment, quand ce mouvement, dont il était le président, est devenu un parti politique, il est devenu le président de ce parti et donc le candidat présidentiel du MDF.
C’est un homme de Lettres. Aussi le monde de l’économie lui est-il peu connu, pour ne pas dire étranger. Il fait ses études à l’université Eötvös Lóránd à Budapest, puis commence à enseigner au lycée, mais, à cause de ses opinions politiques, il doit renoncer à sa vocation d’enseignant. Il travaille alors comme bibliothécaire et archiviste et c’est ainsi qu’il découvre qu’il existe peu de sources dans le domaine de l’histoire médicale ; il consacre dès lors sa vie à les rassembler, à les rédiger et à les classer.
En 1974, il est élu directeur du musée d’histoire médicale Semmelweis. Dans les années 80, il devient le président de l’Assemblée internationale des historiens des sciences médicales.
Après les élections de 1990, on lui diagnostique une tumeur cancéreuse, mais il continue tout de même à travailler sur les réformes économiques et politiques du pays. Le MDF avait formé une coalition avec le parti des petits propriétaires et le parti des démocrates-chrétiens avec qui, quelques années plus tard, le MDF mènera de grands débats.
József Antall meurt le 12 décembre 1993, avant la fin de son mandat. C’est Péter Boross qui lui succède au poste de Premier Ministre. Sous le gouvernement d’Antall, Boross était secrétaire d’Etat politique du bureau du Premier Ministre avant de devenir ministre de la sécurité nationale et de l'information et de commencer à travailler aux côtés d’Antall au Ministère de l’Intérieur. C’est grâce à ce nouveau poste qu’il a pu succéder à Antall comme Premier Ministre. Il ne sera toutefois pas réélu lors des élections de 1994.
Antall a joué un rôle important dans le rattachement de la Hongrie aux organisations ouest-européennes, comme l’OTAN ou l’Union Européenne puisque la Hongrie a commencé à s’entretenir avec l’UE sur les conditions d’adhésion dès 1991. Si sa demande d’entrée au sein de l’UE ne se réalisa pas pendant son mandat, il a beaucoup travaillé sur ce projet (la demande officielle d’adhésion à l’Union Européenne a été envoyée en 1994). C’est par ailleurs lui qui a pris l’initiative de la fondation de la Bourse de Budapest puis qui a suspendu le Pacte de Varsovie.
Un grand philosophe anglais a dit que l’on peut changer de régime politique en 6 mois, de système économique en 6 ans, mais qu’il faut 60 ans pour changer la société. C’est vrai dans un sens pour la Hongrie puisque 6 mois ont été suffisants pour introduire une nouvelle forme d’État. En revanche les gouvernements successifs n’ont pas réussi à changer le système économique de la Hongrie au cours des 6 années qui ont suivi. Mais sans doute la Hongrie aura-t-elle besoin de 60 ans, comme ce philosophe le prédit, pour changer la société et oublier ce système que l’on a essayé de réformer.
Eszter Kocsis