Sólyom for President?
Le mandat du Président hongrois, László Sólyom, prend fin en août prochain et la règle veut que son successeur soit élu au moins trente jours avant qu’il ne quitte ses fonctions, soit le 5 juillet au plus tard. Le temps presse mais aucun nom ne circule pour le moment. Qui donc sera le futur Président hongrois?
La personnalité du Président hongrois, László Sólyom, ne fait pas l’unanimité au sein de la classe politique. Avant d’occuper cette fonction, il était notamment membre de Védegylet, une ONG apolitique active dans la protection de l’environnement. C’est à ce titre qu’il avait alors été désigné candidat à la présidence par certains députés qui allaient devenir les fondateurs du futur LMP (Lehet Más a Politika – La Politique peut être différente). Il fut également membre du mouvement civil Duna Kör, au sein duquel il a lutté activement contre la construction du barrage de Bos-Nagymaros dans les années 1980 (lire article sur Le Dunasaure dans le JFB n°312) et co-fondateurs du MDF. Il a toutefois quitté la scène politique pour devenir président de la Cour Constitutionnelle entre 1990 et 1998. Au tout début de sa présidence, il était considéré comme proche du Fidesz avant de démontrer qu’il se plaçait véritablement au- dessus de la vie politique hongroise, ne manquant pas de critiquer sévèrement certaines actions du Fidesz en 2006 et 2007. Beaucoup partagent l’idée que la personnalité de Sólyom à la tête du pays est nécessaire pour contrebalancer les tensions politiques entre les partis. C’est pourquoi un lobby a-t-il été créé pour appuyer sa réélection. On retrouve à sa tête de nombreux intellectuels hongrois, tel que l’écrivain Gábor Karátson, l’ancien ombudsman László Majtényi, ou le politologue Péter Tölgyessy. Début mai, ils ont fait parvenir une pétition au Parlement afin de promouvoir leur favori. Majtényi a alors soutenu l’idée que «ceux qui souhaitent protéger la République au lieu de la détruire ont intérêt d’avoir Sólyom comme Président». Un groupe Facebook ainsi qu’un site web (Sólyom for President: http://ke2010.hu/) ont également été lancés pour collecter des signatures de soutien. Sólyom a quant à lui affirmé que n’étant pas officiellement nommé candidat à l’heure actuelle, il ne souhaitait pas encore songer sérieusement à cette hypothèse.
Mais qui, à part Sólyom, pourrait remplir cette fonction? Suite au lancement de cette pétition, le Fidesz a déclaré qu’il ne songeait pas à renouveler le mandat de Sólyom.
En outre, selon Viktor Orbán, le gouvernement a encore du temps devant lui avant de désigner qui seront les candidats à la présidence et qu’à l’heure actuelle, ils doivent faire face à «des soucis plus graves que cela». Pour le moment, on ne peut donc que supposer quels seront les candidats possibles de Szilveszter Vizi E., l’ancien directeur de l’Académie des Sciences (MTA) ou de József Pálinkás, l’ancien Ministre de l’Education et actuel directeur de la MTA.
En Hongrie, contrairement à la France par exemple, où le Président est élu au suffrage universel, les candidats à la présidence sont désignés par les députés et le Président est ensuite élu pour cinq ans. Il faut au moins cinquante députés pour déléguer un candidat. Ainsi, cette année, ni le candidat du Jobbik (Krisztina Morvai), ni celui du LMP (László Sólyom) ne peuvent théoriquement participer aux élections. En revanche, le Fidesz disposant d’une majorité des 2/3 au Parlement, il peut élire qui bon lui semble. Mais outre son élection, le rôle du Président hongrois est aussi très différent de celui du Président Français. Contrairement à ce dernier, à la tête du pouvoir exécutif, le président hongrois a un rôle plutôt diplomatique. Il a tout de même le pouvoir de refuser et de valider des projets de loi ou de les renvoyer devant la Cour Constitutionnelle, ce que Sólyom a souvent pratiqué lors de sa présidence et qui a irrité le Fidesz. Le politologue Tölgyessy note par ailleurs que Sólyom n’a pas toujours été un Président idéal. Il a refusé d’endosser le costume du Président populaire et aimé de tous et son style aristocratique a souvent été mal perçu. En revanche, ces cinq dernières années, il a su démontrer sa neutralité politique et son attachement à la protection de la constitution. Or ces caractéristiques sont essentielles dans le cas de figure que connaît la Hongrie actuellement, avec un parti majoritaire qui dispose de plus de 66% des voix au Parlement. Si le Fidesz élit son propre Président, nul ne pourra réellement contrebalancer leur pouvoir. Une situation dérangeante pour une démocratie européenne.
Kinga Neder
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