Réactions timorées

Réactions timorées

Milices fascistes à Gyöngyöspata

 

Alors que les conflits s’intensifient entre la minorité tzigane et l’extrême droite dans le village de Gyöngyöspata, dans le nord de la Hongrie, les solutions proposées par les autorités sont-elles à la hauteur du problème ?

 

Gyöngyöspata a retrouvé son calme pour l’instant, cela peut s’expliquer par le déploiement exceptionnel de forces de police dans ce village. Il faut dire qu’il y a quelques jours les Roms et la milice d’extrême droite, le Véderô, ont annoncé une «guerre civile» prochaine entre les deux communautés.

Depuis que les organisations paramilitaires et le Jobbik ont organisé leur première marche dans le village, la tension monte. Le Véderô a installé fin avril un camp d'entraînement dans la localité. Le 26 avril, quatre personnes ont été blessées dans une bagarre entre des membres du Véderô et des Roms à Gyöngyöspata. Les récits publiés dans les médias hongrois sont contradictoires et relatent des faits différents sur les origines de cet affrontement violent - et aucune des deux communautés ne reconnaît sa responsabilité. La police était déjà intervenue lors d’un entraînement paramilitaire du Véderô Plusieurs membres de ce groupuscule avaient été mis en garde à vue, dont le chef du groupe, Tamás Eszes. Ils ont tous été relâchés quelques jours plus tard.

Le Parlement a finalement accepté une modificiation de code pénal qui vise à „punir les actions menées par une garde civile sans accord préalable de la police ou la simulation d'action de maintien de l'ordre.”

L’introduction de cette disposition permet de condamner à trois ans de prison tous ceux qui intimideraient par la violence les membres d’un groupe national, racial, ethnique ou religieux. Cela permet également de condamner à deux ans de détention tous ceux qui se livrent à des actions d’ordre public à la place des autorités publiques et violent ainsi le monopole de l’État. Le porte parole du Premier Ministre, Péter Szíjjártó, a expliqué cette modification du code pénal par le fait qu’une nouvelle forme de criminalité, „la criminalité en uniforme”, est apparue en Hongrie.

Le Parlement a créé une commission pour étudier cette „criminalité en uniforme.” Elle devra également déterminer si ces milices ont participé à ”déstabiliser l’ordre public dans le pays” et donner un avis. Curieusement, le gouvernement s’interroge sur la responsabilité de l’ancien premier ministre, Ferenc Gyurcsány, et celle de l’homme d’affaire Richard Field, connu pour avoir subventionné le LMP. Ce dernier a organisé avec la Croix Rouge l’évacuation de 300 Roms à Gyöngyöspata dès le 22 avril. Ferenc Gyurcsány a financé et soutenu cette action visant à protéger la minorité Rom du village grâce à une aide d’1 million de forints.

L’opposition conteste toutefois la modification du code pénal qui ne prend pas en compte les actions déguisées des groupes paramilitaires : la Magyar Gárda, le Véderô ou la fondation Szebb Jövôért liée au Jobbik, annoncent souvent leurs regroupements comme de simples réunions «pacifiques». Ils appellent à des marches sur Facebook sous le titre „journée familiale”. Ils obtiennent ainsi sans difficulté les autorisations nécessaires pour organiser leurs événements, même s’ils manifestent ouvertement leur antziganisme lors de ces mêmes événements. Dans leurs prières, ils profèrent ce type d’incantations : „Dieu, libère notre pays des tziganes.” Le chef du Véderô, Tamás Eszes, est connu pour ses idées nationalistes. D’après ses propres aveux, ll a été emprisonné plusieurs fois et était membre de la Légion Etrangère puis de la Magyar Gárda. M. Eszes souhaite être candidat au poste de maire de Gyöngyöspata, le maire ayant démissionné le jour où le Véderô a installé son camp d’entraînement dans le village. Gyöngyöspata votera pour son nouveau maire en juin.

Judit Zeisler

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