Quand Paris héberge les chefs-d’œuvre des musées de Budapest: une aubaine à ne pas manquer
Pour qui réside en permanence à Budapest, se rendre à Paris pour y contempler les tableaux des collections hongroises paraîtra pour le moins saugrenu. Et pourtant... L’exposition qui se tient actuellement au Musée du Luxembourg sur le thème „Chefs-d’œuvre de Budapest” constitue une occasion exceptionnelle pour retrouver et admirer ces œuvres dans des conditions (quasi) idéales, même pour ceux qui sont censés les côtoyer quotidiennement sur les bords du Danube.
Tout d’abord, parce qu’elle regroupe au même endroit des tableaux par ailleurs dispersés, sans compter qu’il s’agit là d’une sélection des meilleurs d’entre eux. Mais aussi pour la documentation forte bien conçue qui les accompagne.
Profitant d’une fermeture pour rénovation du Musée des Beaux-Arts de Budapest, responsables Hongrois et Français ont eu l’idée de déplacer provisoirement ces œuvres pour les accueillir à Paris, ne serait-ce que le temps d’une exposition (*).
85 œuvres (tableaux et sculptures) provenant non seulement du Musée des Beaux-Arts (peinture européenne), mais aussi de la Galerie Nationale (peinture hongroise). Regroupés sur 8 salles autour de 8 périodes et 8 thèmes: Fin du Moyen Âge, Renaissance germanique, XVIe siècle, „Un nouvel élan religieux”, L’âge d’or hollandais, „Caractères” (portraits à travers les époques), La nouvelle peinture (impressionnistes, postimpressionnistes, mouvements de la fin du XIXe), Symbolisme et modernité.
Outre son caractère inédit par la rareté de l’évènement, l’exposition offre donc l’intérêt de présenter ces œuvres dans une suite logique, chronologique et thématique et de les recadrer dans le contexte de l’histoire du pays.
Parmi les œuvres présentées figurent en bonne place les représentants de la peinture espagnole (Greco, Goya), mais aussi des noms aussi prestigieux que Dürer, Cranach, Tiepolo et Veronese, ou encore Monet, Manet, Van Gogh, Cézanne ou Gauguin. Mais aussi, moins connus du public parisien, les peintres hongrois de la fin du XIXe et début du XXe, inspirés de la France où ils ont pratiquement tous séjourné, tel un Mihály Munkácsy ou un József Rippl-Rónai (qui fut l’ami de Maillol) ou encore Pál Szinyei-Merse et Károly Ferenczy.
Notre propos n’est pas ici de retracer l’histoire de ces œuvres et des musées qui les abritent, d’autant que notre confrère Joël Le Pavous l’a fait de façon magistrale dans le numéro que la revue Beaux-Arts consacre à l’exposition. Il nous suffira juste de rappeler le rôle joué par la famille des princes Esterházy qui s’était constitué un fonds de 600 œuvres, toutes reprises par les musées nationaux. Des mécènes à qui les Hongrois doivent une fière chandelle.
Quant aux explications qui accompagnent chacune des huit salles, elles ont été fort bien conçues, dressant pour le visiteur parisien un bref descriptif du contexte historique. En quelque sorte un livre d’histoire illustré, mais quelles illustrations!
Puisque nous évoquons le contexte historique, à signaler au passage que la boutique du musée offre, le temps de l’exposition, un choix unique et presque exhaustif des ouvrages relatifs à la Hongrie: guides, romans, études, ouvrages d’histoire, etc. On y trouve même du vin hongrois (tokay, alias tokaji) ! Pour qui s’intéresse au pays et à sa culture, inutile donc de courir les librairies: vous avez ici tout sous la main.
Seul hic: la foule. Rançon du succès, certes, mais pas forcément bienvenue pour qui veut contempler les tableaux à son aise. Les salles étant relativement exigues, ce qui ne retire rien à la qualité de la présentation, les tableaux étant tous bien mis en valeur.
Quoi qu’il en soit: une exposition à voir absolument, d’autant que l’occasion ne se représentera pas d’ici longtemps.
Pierre Waline
(*): du 9 mars au 10 juillet 2016
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