Pouvoir et médias

Les élections parlementaires hongroises approchant, les partis politiques font de plus en plus pression sur les médias.

Le parti Fidesz est en train de se constituer un empire médiatique qui s'avèrera très utile lors de sa campagne électorale. Ainsi, début décembre, un nouvel hebdomadaire sera lancé auquel la fondation du Fidesz (PMA) versera entre 20 et 30 millions de HUF pour assurer ses premiers pas. Le journal s’intitulera Nagyítás (Agrandissement) et le rédacteur en chef sera János Csontos, auteur de 25 livres dont 7 recueils de poèmes. Le président de la fondation qui soutiendra le “nouveau-né” est le célèbre écrivain Sándor Csoóri. Le journal se dit culturel et assure ne pas vouloir se mêler de politique.

Plus d'un organe de presse avaient la même devise à sa naissance et l’on a pu ensuite observer la manière dont la politique les avait “avalés”. Selon plusieurs analystes politiques, le Fidesz n’attend ainsi pas le changement du gouvernement pour commencer son offensive tout-terrain, il l’anticipe au contraire dès maintenant.

Dans quelques jours, deux stations de radio commerciales très populaires, Danubius et Sláger Rádió, devront céder leurs fréquences à deux nouvelles stations. L’un des vainqueurs est le Konzorcium FM1 qui exploite actuellement Radiocafé, et l’autre est Advenio Zrt. exploitant Lánchíd Rádió, deux radios dont ils devront se défaire au nom de la libre concurrence. Cette décision de l’ORTT (Autorité nationale de la radio et de la télévision) a été très fortement contestée ces derniers jours et, selon les rumeurs, des pression politiques se cachent en arrière-plan de cette décision. Les deux nouvelles stations, Klassz radio et Néo FM, l’une de gauche et l’autre de droite, pourront commencer leur activité dès la mi-novembre. Le président de l'ORTT, László Majtényi, qui n’avait pas souhaité voter lors de ce concours d’attribution des ondes, a depuis démissionné car il soupçonnait que cette décision avait été prise sous pression politique et non pour des raisons professionnelles.

Enfin, il y a quelques semaines, la télévision nationale (MTV) a soudainement rompu le contrat avec le producteur de l’émission Nap-kelte, Tamás Gyárfás, après de nombreuses années de coopération, justifiant sa décision par des raisons financières. MTV a remplacé cette émission par une production “maison”, qui lui coûtera beaucoup moins cher – dit-elle.

Tous ces événements qui se sont succédés ces dernières semaines, précisément quelques mois avant les élections parlementaires, semblent clairement indiquer que le pouvoir passera très prochainement aux mains de la droite et que le monde des médias doit dès à présent s’ajuster à ce changement. L'intérêt est réciproque, la politique a besoin des média et les média des politiques, par conséquent on assiste à la recherche et à l’acquisition d'espaces encore disponibles dans les média par les partis politiques.

Jobbik, le parti radical de droite, a lui aussi trouvé sa chance en la personne de Gábor Széles, un entrepreneur milliardaire. Il a tout d’abord créé la chaîne de télévision Echo Tv avant de soutenir le journal Magyar Hírlap, alors en pleine crise financière. On entend souvent dire que le Fidesz n’a rien de commun avec le Jobbik, et l’on serait tenté d’y croire. Toutefois, il est certain qu’au cours de la campagne électorale à venir, les sympathisants du Fidesz seront d’avantage tentés de prendre connaissances des analyses énoncées par les sources médiatiques proches du Jobbik plutôt que celles proches du MSZP.

Infocenter-csoport, qui détient Lánchíd Rádió et Advenio Zrt. ainsi que l'hebdomadaire le plus prestigieux de la droite Heti Válasz; Nemzet-csoport possédant entre autres Magyar Nemzet (le porte-voix du Fidesz) et Hír Tv; et finalement Széles-csoport possédant notamment Echo Tv et Magyar Hírlap seront une base très forte pour le Fidesz l’année prochaine. Sans oublier les chaînes de télévision du service public qui glisseront automatiquement dans le giron du parti politique vainqueur des prochaines élections. En face, le MSZP se doit de réagir très rapidement en renforçant ses sources médiatiques existentes voire même en en créant de nouvelles afin de rester en compétition avec le Fidesz.

Bálint Seres