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«Changer l’attitude de rejet des Hongrois vis-à-vis de la taxation est difficile et prendra du temps, mais les taxes en sont en partie responsables»: un an après, cette déclaration du président de l’audit de l’Etat, Árpád Kovács, reste valable, comme le montre le dernier rapport de l’OCDE.
Publié le 15 mai dernier, le dernier rapport de l’OCDE situe la Hongrie au deuxième rang des pays de l’OCDE pour la taxation du travail. Le taux affiché de 54,1% se compose de l’impôt sur le revenu (15,8%), les charges salariales (12,6%) et les charges patronales (25,7%). La Hongrie est avec la Belgique et l’Allemagne le seul pays de l’OCDE dans lequel un salarié célibataire sans enfant ramène chez lui moins de la moitié de ce que son entreprise lui verse comme salaire brut . Du fait de certaines exonérations, ce taux passe à 43,9% pour un couple marié disposant d’un seul revenu égal au salaire moyen et ayant deux enfants, mais il place tout de même la Hongrie en tête des pays de l’OCDE pour cette catégorie.
Vous l’aurez compris, le système de taxation hongrois est assez contraignant et n’est pas sans rappeler celui des pays nordiques. Cependant, alors qu’en Suède ou au Danemark les citoyens n’ont pas de réticence à payer leurs impôts, c’est loin d’être le cas en Hongrie, où beaucoup semblent s’imaginer que l’Etat pourrait très bien se passer de ce type de ressources. Aussi les fraudes sont-elles fréquentes dans le pays et les recettes de l’Etat s’en ressentent chaque année. L’un des derniers exemples de cette tendance est celui d’une fraude massive sur la TVA, qui coûterait à l’Etat dix milliards de HUF, et sur laquelle les autorités enquêtent actuellement.
Forcé de réagir du fait des conditions fixées par le FMI, le gouvernement a présenté au Parlement, vendredi dernier, son projet de réforme du système fiscal. Le ministre des finances, Péter Oszkó, a défini ce programme comme «une reconfiguration de la taxation accompagnée d’un allègement de la taxation du travail afin de stimuler l’emploi et, à terme, l’économie nationale». Parmi les mesures proposées, la tranche de revenus les plus modestes devrait être élargie aux personnes dont le revenu annuel atteint au maximum 5 millions de forints : ces derniers bénéficieront donc du taux d’imposition de 17% (contre 32% pour les hauts revenus). Cette réforme de l’impôt sur le revenu devrait être accompagnée d’une taxe foncière: les propriétés d’une valeur supérieure à 30 millions de HUF seraient ainsi imposables à hauteur de 0.35% – avec des possibilités d’exonération pour les familles nombreuses. Cette taxe présente l’avantage non négligeable d’être difficile à éviter, une propriété foncière n’étant pas aussi simple à dissimuler qu’un compte en banque. Concernant la fiscalité du travail, elle serait simplifiée du fait de la suppression de la taxe de solidarité de 4% en contrepartie d’une hausse de la taxe sur les entreprises de 16 à 19%. Enfin, si les taxes minimes devraient être supprimées, les impôts indirects devraient quant à eux être en hausse: outre le passage du taux de TVA de 20 à 25%, le gouvernement a proposé d’augmenter la taxation des cigarettes, de l’essence, des alcools de 5 à 6%, et ce dès juillet prochain.
Salué par le FMI comme allant «dans le bon sens», le paquet de réformes sur lequel le Parlement devrait se prononcer d’ici juin prochain reste toutefois insuffisant. Les charges pesant sur le revenu du travail demeurent lourdes au regard des autres pays de l’OCDE, alors qu’il est nécessaire d’attirer les investisseurs étrangers dans le pays.
Christelle Lapierre