Pas de juste milieu !

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Réforme des retraites

 

Alors qu’il vient de supprimer le 2ème pilier de cotisations retraite, le gouvernement d’Orbán touche une fois de plus à ce sujet sensible, mais sous un autre angle. Si on s’en tient aux nouvelles mesures qu’il vient de présenter, les juges devront prendre leur retraite à 62 ans, les forces de l’ordre quant à elles ne bénéficieront plus de retraites anticipées. Ces professions estiment que ces mesures sont justifiées par des motifs d’ordre politique…

La retraite des juges

Le projet de nouvelle constitution stipule que les juges prendront désormais leur retraite à l’âge de 62 ans, au lieu de 70 ans actuellement. L’amendement déposé par János Lázár, président du groupe des députés Fidesz, a fait l’objet de vives polémiques y compris parmi les partis de la coalition. Cet amendement a donc été rejeté dans un premier temps. Remis à l’ordre du jour, il a finalement été approuvé à la majorité des membres du comité des affaires constitutionnelles du Parlement. Selon le Fidesz, les lenteurs constatées dans le système juridictionnel et également l’échec de la réforme judiciaire justifient la réorganisation de ce corps professionnel. Si les députés votent la nouvelle constitution, dès le 1er janvier 2012, 228 juges devront prendre leur retraite. De plus, 46 autres juges seront obligés de mettre un terme à leur carrière au cours de l’année 2012.

L’abaissement de l’âge de la retraite pour les juges a généré de vives réactions chez certains corps professionnels, en particulier l’Ordre des avocats. Lors d’une conférence de presse, András Baka, Président de la Cour suprême et du Conseil national de la justice, a affirmé que le projet gouvernemental n’est autre qu’une attaque contre les tribunaux et les juges, sans fondement réel. Selon lui, l’abaissement de l’âge de la retraite aura des conséquences graves : le départ de plus de 200 juges freinera bien entendu les procédures en cours qui, pour la plupart, ont déjà pris du retard. « Parmi les juges, l’indignation et l’inquiétude ne cessent d’augmenter. De plus, cette affaire prend une tournure politique, personne ne comprend en effet pourquoi les juges sont les seuls à être concernés par la mesure» a-t-il ajouté.

Le 14 avril dernier, une lettre adressée à l’ensemble des citoyens hongrois et européens, signée par les présidents des Tribunaux départementaux, du Conseil national de la justice et de la Cour suprême, a été rendue publique. Le document affirme que le projet du gouvernement va à l’encontre de la réglementation internationale relative à l’indépendance des juges et qu’il met en péril l’impartialité des tribunaux. En outre, les signataires reprochent au gouvernement l’absence de dialogue avec les métiers de la justice et trouvent inacceptable, 21 ans après le changement de régime, qu’il soit toujours nécessaire de défendre les valeurs fondamentales de la démocratie.

Suppression des retraites anticipées

Le plan Kálmán Széll, présenté le 1er mars dernier, prévoit la réorganisation du système de retraites, avec notamment la suppression des retraites anticipées. Le plan préconise la mise en oeuvre de nouveaux critères de carrière pour les différentes branches professionnelles qui ont jusqu’ici bénéficié des retraites anticipées. Ces critères prennent en compte les spécificités du travail accompli. Statistiquement, la suppression de ce type de retraites permettrait de créer plus d’équilibre dans le système global de sécurité sociale et d’accroître le niveau de l’emploi.

De leur côté, les syndicats considèrent le maintien des retraites anticipées comme justifié puisqu’il s’agit d’un droit résultant du contrat de travail conclu par l’employé et l’Etat.

Des négociations ont été entamées entre le ministère de l’Intérieur et 14 syndicats afin de trouver une solution à cette situation. Elles n’ont pu se poursuivre en raison de désaccords majeurs entre les parties. La porte-parole du gouvernement, Anna Nagy, a déclaré que le gouvernement veut poursuivre les négociations avec les syndicats, mais qu’il trouve inacceptable que certains agents puissent partir à la retraite de manière anticipée, en bonne santé, particulièrement en cette période de crise. Les syndicats quant à eux ont organisé une manifestation le 16 avril dernier devant le Parlement pour revendiquer leurs droits.

La situation en Europe

D’après le Conseil national de la justice, les données européennes montrent que l’âge actuel de départ à la retraite des juges hongrois s’inscrit dans la moyenne européenne : dans de nombreux pays européens comme la Belgique, le Portugal, la Slovénie, la Pologne etc..., les juges prennent également leur retraite à 70 ans. Par contre, au Royaume-Uni et en Espagne, ils peuvent travailler jusqu’à l’âge de 75 ans.

Le principe d’abaissement de l’âge de la retraite des juges va donc à l’opposé de la tendance européenne qui est d’augmenter progressivement l’âge de départ à la retraite afin d’équilibrer le système de Sécurité sociale. Mais depuis quelque temps, la Hongrie suit son propre chemin…

Máté Kovács

 

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