Milou en Mai : Fait ce qu’il te plaît

Milou en Mai : Fait ce qu’il te plaît

Réalisé en 1990, le film de Louis Malle souhaite faire renaître les révoltes tumultueuses de mai 68, en recréant une « famille » typiquement franchouillarde afin d’observer les clichés qu’elle peut offrir mais aussi les changements brutaux que procure cette période historique.

 

Par une belle matinée, Milou, 73 ans, épicurien dans l’âme découvre sa mère morte sur le fauteuil du grand escalier de la maison. Désemparé d’avoir perdu sa chère maman, ce personnage attachant reprend contact avec sa famille, afin d’annoncer le décès.

Dès l’arrivée de sa fille, ses nièces et quelques « amis » proches, un jeu rocambolesque se met en scène ; tout le monde souhaiterait bénéficier d’une partie de l’héritage.

Entre sa fille avare, qui vole les bijoux de la défunte, l’homosexuelle cachée qui s’autorise quelques sauteries avec son élève de danse classique ou bien Milou, aux côtés pervers et coquins s’imaginant déjà troquer la bonne pour la femme de son cousin, la course à l’héritage paraît, à ses débuts, assez impossible.

Qui n’a pas été sage ?

Quand vient l’heure du partage, une querelle monstre envahit la grande maison. Au fond de la pièce, on aperçoit le poste de radio, toujours allumé sur les informations. Parfois on entend De Gaulle et quelques polémiques apparaissent : « tu aimes De Gaulle ? », « Paraît qu’il n’est pas très bien perçu en Angleterre ». Des discours enfantins, des prises de becs et des crêpages de chignons pour savoir qui mériterait le buffet Louis XVI… Plus le conflit étudiant prend de l’ampleur, plus les Vieuzac crachent leurs plus douloureuses chimères. L’anarchie est en marche, pas la séparation des biens.

Grotesque mais réaliste

Mais que diable vient faire mai 68 dans cette comédie romantique aux pointes humoristiques ? Louis Malle voulait sans doute rompre avec les codes si rouillés utilisés dans le cinéma d’histoire : il savourait l’idée qu’ailleurs en France, une famille au summum du cliché français puisse aussi vivre la passion de cette année-là. Une fougue plus maîtrisée, certes, mais qui adopte une liberté presque infantile.

Ainsi, on danse, on chante en fumant des joins, on s’adonne au tripotage ou alors on se risque à faire l’amour devant la foule… Ici, pas de policiers ni de manifestants, juste des hommes qui réapprennent à vivre et à se contenter des choses simples.

Après une cavale dans la forêt, croyant la révolution en marche, Les Vieuzac entendent De Gaulle s’exprimer enfin et tout rentre dans l’ordre. La famille retrouve alors les mêmes codes amers qu’ils avaient cru chasser le temps d’un voyage.

Lors de l’enterrement, les visages sont creusés, la mine est morose et le cœur est froid. Malgré tout, chacun reprend son chemin, laissant le bonheur au bord de la route.

Caroline Knecht

 

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