Malév / Aéroport de Budapest : un secteur stratégique privatizé

Malév / Aéroport de Budapest : un secteur stratégique privatizé

 

En pleine mutation économique, le transport aérien est en train de changer de statut en Hongrie. Après la privatisation de la compagnie nationale Malév, c’est au tour de l’aéroport de Budapest de changer de propriétaires.

Alors que l’Europe se tourne vers son partenaire transatlantique avec la construction du partenariat Open Sky de libéralisation des échanges aériens, le secteur centre et est-européen opère depuis deux ans une mutation fondamentale. Malév, compagnie nationale hongroise notoirement endettée, a transformé son capital composé de fonds essentiellement publics en fonds privés (99,95%). L’Agence de Privatisation (APV) avait annoncé ce changement en février dernier, et ce sont désormais les terminaux aéroportuaires qui sont l’objet de mouvements financiers.

 

Une innovation économique étonnante

Les innovations économiques ne manquent pas dans le secteur aérien. Les exploitations conjointes de vols sont par exemple régulièrement pratiquées. Il n’est pas rare de voir un vol Air France partagé par Malév et inversement, dans un souci de rentabilisation des coûts. De même, l’intégration de la compagnie nationale dans le jeu des alliances, avec son entrée dans OneWorld (concurrent de Sky Team dont fait partie Air France) aux côtés de British Airways et de American Airlines, est à même de protéger ses actifs en développant son activité de manière concertée, encadrée par des partenaires de taille.

Malév poursuit ainsi ces innovations économiques puisqu’elle a donc choisi de se chercher une santé financière auprès d’investisseurs privés, à l’inverse des tendances du XXème siècle où la compagnie nationale, objet de fierté, devait rester dans le giron étatique. La chose est d’autant plus étonnante que l’investisseur déclaré vainqueur par l’APV était Airbridge Zrt., filiale d’Airunion, le groupe russe de Boris Abramovich. Ainsi, alors que les pays d’Europe centrale et orientale font face à des relations mouvementées avec Moscou (gaz en Ukraine, viande en Pologne, patrimoine historique en Estonie, défense anti-missile en République tchèque et Pologne), la Hongrie a choisi de vendre la compagnie nationale à une entreprise russe. Cette privatisation aurait été difficilement imaginable il y a quinze ans et reflète bien l’ouverture actuelle du marché.

 

Des aéroports en quête de suprématie

La dernière étape en date de la mutation du transport aérien hongrois est la modification du capital de la société Aéroport de Budapest. Son plan de développement stratégique inclut, depuis l’automne 2004, de nombreux développements d’envergure destinés à faire de Budapest une plaque tournante du transport aérien européen. La localisation géographique du pays permet en effet d’imaginer la création d’un pôle de distribution vers l’Europe occidentale, les Balkans, l’Europe orientale et la Russie. Plus prosaïquement, Budapest jouit d’un avantage qui est à la fois son principal inconvénient puisque sa position centrale sur le continent la met en concurrence directe avec d’autres places importantes, dont les aéroports Vienne International ou Milan Malpensa ne sont pas des moindres.

Cette concurrence n’a certainement pas été sans incidence sur la décision d’ouvrir le capital de la société à de nouveaux investisseurs. Avec une croissance de 6% entre octobre 2005 et octobre 2006, avec environ 8,3 millions de passagers, Aéroport de Budapest, malgré une fréquentation très relative en comparaison des grands aéroports mondiaux, est en nette progression.

Cette amélioration des performances a été saluée en juin dernier par l’entrée dans le capital d’Aéroport de Budapest de Hochtief Airport, société d’origine allemande qui comprend également des fonds du Canada et de Singapour. HTA, consortium subsidiaire de Hochtief est déjà actionnaire d’aéroports importants comme Sydney, Hambourg ou Athènes. Il est désormais dans le capital d’Aéroport de Budapest à hauteur de 49,66 %. Hochtief prend ainsi la suite du britannique BA, qui avait conclu un accord en 2005 portant sur 75% d’Aéroport de Budapest pour 1,8 milliard d’euros comprenant une licence d’exploitation de l’aéroport pour 75 ans.

Un développement conditionné

Afin de lutter contre une concurrence rude, les aéroports tentent de conjuguer savamment un développement de leurs capacités d’accueil des compagnies aériennes tout en ne s’engageant pas dans des investissements trop avancés, ce qui risquerait d’être contre-productif en terme de rentabilité, et donc de faire perdre du terrain face à la concurrence. En ce sens, l’extension des hubs, ou plateformes aéroportuaires, revêt une importance toute particulière. Encore faut-il pourtant que leur exploitation soit pérenne afin que leur création et entretien soient rentabilisés. Le marché du transport aérien est en effet très mouvant depuis une quinzaine d’années pour deux raisons : les intrants sont de plus en plus nombreux et les mouvements de capitaux sont très rapides.

Si le transport aérien hongrois suit nettement la tendance, reste que son développement ne peut se faire sans l’adaptation des infrastructures connexes. En ce sens, l’arrivée d’un tram et l’élargissement de la voie expresse menant aux terminaux semblent impératifs. A charge donc désormais de Airbirdge Zrt. et de HTA d’assurer l’évolution du secteur lui-même, et aux autorités de permettre collatéralement ce développement.

Péter Kovács

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