L’indépendance fiscale

L’indépendance fiscale

Le Pacte pour l'euro

 

C’est ainsi que le Premier Ministre a justifié son refus de se joindre au «Pacte pour l’euro» conclu par les Etats de la zone euro, mais néanmoins à tous les Etats membres de l’UE. Ce pacte est destiné à se prévaloir contre toute instabilité au sein de l’Union économique et monétaire européenne (la zone euro) ainsi qu’à encourager les gouvernements des Etats candidats à la monnaie unique à travailler dans l’esprit de convergence des critères du Pacte de stabilité et de croissance.

Les chefs d’Etat ou de gouvernement de la zone euro ont adopté un «pacte pour l’euro», auquel ont également adhéré la Bulgarie, le Danemark, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne et la Roumanie, en vue de renforcer le pilier économique de l’union monétaire, de conférer une qualité nouvelle à la coordination des politiques économiques, d’améliorer la compétitivité et de parvenir ainsi à un niveau de convergence plus élevé. Les autres Etats membres sont invités à participer s’ils le souhaitent. Tout ceci afin de poursuivre quatre objectifs : favoriser la compétitivité, favoriser l’emploi, mieux contribuer à la viabilité des finances publiques et renforcer la stabilité financière. L’adhésion à ce texte permet, en outre, d’avoir accès au mécanisme européen de stabilité (MES), qui entrera en vigueur après 2013.

La Hongrie, la République tchèque, la Suède et le Royaume-Uni ont fait savoir qu’ils ne se joindraient pas à ce texte inspiré par Berlin. Les deux premiers pays, entrés dans l’UE en 2004, ont l’obligation d’intégrer la zone euro une fois qu’ils seront en conformité avec les critères du Pacte de stabilité et de croissance. Les refus hongrois et tchèque apparaissent comme une manière de montrer que l’adoption de l’euro n’est pas une priorité dans ces deux pays. M. Borissov, chef du gouvernement bulgare, est même allé jusqu’à dire : «si nous ne soutenons pas le pacte pour l’euro, ce n’est pas la peine de demander d’entrer dans la zone euro». Plus qu’une tentative de stabilisation de la zone euro après les événements grecs, irlandais et portugais, ce pacte est donc aussi un moyen de jauger l’enthousiasme des pays d’Europe centrale et orientale à intégrer la zone euro.

Viktor Orbán a déclaré que Budapest ne prendrait pas part à ce pacte car il souhaite garder son «indépendance fiscale» et aboutir à ce que la Hongrie se dote du «système fiscal le plus compétitif en Europe». M. Orbán a assuré que l’ensemble des forces politiques hongroises s’étaient accordées sur ce sujet. Budapest et Prague font donc bloc contre le texte en avançant qu’une harmonisation fiscale ne serait pas dans leurs intérêts respectifs ainsi qu’en plaidant pour le dumping fiscal au sein de l’UE. En République tchèque, un député de l’opposition socialiste a néanmoins critiqué cette décision en craignant qu’elle n’ait pour conséquence de trop écarter le pays de l’UE.

Le pied-de-nez du Premier Ministre hongrois s’inscrit bien évidemment dans sa politique à l’égard de l’UE depuis le début de son mandat qui consiste à respecter le principe d’indépendance nationale et à ne pas se plier aux règles émanant de Bruxelles ou encore de Washington. Il tente donc d’adopter l’attitude contraire à celle du précédent gouvernement socialo-libéral qui, pendant la «période Bajnai» a appliqué systématiquement les recommandations externes. Il y a donc une cohérence dans la décision de M. Orbán. Celle-ci correspond à son discours sur l’Europe et exprime une réelle divergence avec l’opposition socialiste. Sur la question de l’euro et donc du Pacte de stabilité et de croissance, la volonté politique du Fidesz peut toutefois se révéler problématique. En effet, bien que M. Orbán ne veuille pas se plier aux impératifs européens, sa politique économique, excepté en matière de retraites, consiste bien en la recherche du respect des critères de Maastricht. M. Orbán n’est-il pas partisan de la constitutionnalisation d’un taux de déficit et d’endettement maximum ? M. Orbán ne s’est-il pas attelé à la réduction drastique des dépenses publiques ? Le plan Kálmán Széll ne prévoit-il pas de réduire le déficit public à 1,9% et l’endettement à 50% du PIB d’ici 2014 ? Ce même plan ne prévoit-il pas la réduction des investissements publics ? Le gouvernement ne se méfie-t-il pas de l’inflation ? En somme, la Hongrie fait figure de bon élève de la Commission européenne. Toujours est-il que la communication du gouvernement est clairement hostile à Bruxelles, alors que sa politique économique ne l’est pas tant. En effet, les critères de Maastricht, qui soit dit en passant étaient déjà violés par l’immense majorité des Etats de la zone euro dès leur entrée en vigueur puisque calculé sur la base de chiffres d’un passé révolu, ne sont pas contradictoires aux objectifs du gouvernement hongrois, notamment en ce qui concerne la stabilité financière.

Yann Caspar

 

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