Les «Sabras» de la Galerie 2B
Kontroll ou les reflets lointains de la Terre promise – un portrait intéressant et plutôt rare d’Israël et ses relations avec ses voisins.
A l’entrée, tout de suite, laissons nous surprendre par l’ambiance accueillante et même idyllique. Les douces figues de barbarie (sabra) moulées en plâtre font partie de la première installation – où un petit garçon se promène en prenant soin de pas abîmer ces morceaux…
Ce fruit de cactus est une nourriture très importante dans le désert, mais difficile d’accès – et c’est aussi pourquoi tout un univers symbolique lui est attribué. C’est Laurent Mareschal a créé ce champ et lui a donné le titre Figures de barbarie, de celles qui empêchent de passer les frontières . Ces petites sculptures sont à l’image d’un champ de mine, il ne faut pas le toucher et il ne faut surtout pas qu’il s’explose. Laurent Maréschal est français et vit à la fois en France et en Israël avec son épouse, l’artiste israélienne Tami Notsani, aussi en connait-il les réalités. Il a exposé diverses variantes de cette oeuvre à Paris et à Genève dans des galeries, à la Foire off de la FIAC ou encore au Grand Palais, et il est allé jusqu’à Riga, Sarajevo et Bogota avec ses oeuvres. Avec Tami, ils ont tourné des films documentaires et ont réalisé plusieurs projets au Studio national d’art contemporain le Fresnoys – ce lieu toujours à la recherche de nouvelles expériences dans la création.
Tami a participé aux Rencontres photographiques d’Arles ainsi qu’à de nombreuses autres expositions, de Marseille à Lodz. A Budapest on découvre une série de ses photographies prises récemment en couleur et contrecollée sur de l’aluminium et qui s’intitule Comme beaucoup de choses dans ce pays. Tami a pris ses photos dans sa région natale, en Galilée, au Nord d’Israël. Elle s’intéresse aux constructions à l’abandon mais aussi à la construction de maisons habitées, par les arabes et par des israéliens. Tout cela montre un visage du pays que l’on ne connaît peu: quelque chose de très quotidien, de très humain, où il n’y a pas de violence.
Les photos et les vidéos de Simcha Shirman présentent aussi des scènes de la vie quotidienne en Israël. L’artiste, qui vit à Tel-Aviv, se rend souvent dans des coins désertés et désertiques du pays – une ambiance d’incertitude règne à ce moment aux frontières éphémères.
La commissaire de l’exposition, Sári Stenczer, pense que la démarche de ces artistes, en enregistrant les scènes de la vie quotidienne, les sentiments souvent ambivalents entre l’homme et le paysage, est un vrai travail d’archéologue, d’anthropologue. Ronen Eidelman va plus loin dans ses performances. Il évoque le souvenir d’un ancien village arabe sur le chemin qui relie Tel-Aviv et Jaffa. Artiste dévoué au «public art», il s’intéresse à la réaction des gens qui passent dans les rues, dans les parcs, et qui se souviennent. Et il va jusqu’à Weimar où il reprend toute la problématique des frontières et celle d’une ancienne ville historique de l’Est.
Laurent Mareschal a également exposé des dessins blancs sur blancs, presque invisibles, pour signifier que l’on est constamment sous contrôle, que l’on vive à Londres, à Berlin ou ailleurs. Il a réalisé une performance dans un village situé à la frontière israélo-palestinienne, près de Jérusalem. Là encore il s’agit encore de la problématique du mur qui ne peut pas être, pense l’artiste, une solution à long terme. Et enfin deux artistes hongrois vivants à Budapest se sont rendus en Cisjordanie et en Israël pour réaliser un film documentaire qui donne de l’espoir. Deux localités frontalières vivent dans une symbiose paisible. Des eaux usées de Tulcare, en Cisjordanie, arrivent dans un lac où, filtrées, elles assurent l’approvisionnement en eau du kibboutz Yad Hanna avec sa végétation et ses oiseaux faisant partie du patrimoine de la région. Son titre? Harmonia mundi.
Éva Vámos
2B Galéria, IXe arrt. Ráday utca 47
Jusqu’au 1er août
Du mar. au ven. de 14:00 à 18:00, sam. de 10:00 à 14:00