Les peintres dans l’Histoire au Musée Ludwig

Les peintres dans l’Histoire au Musée Ludwig

Avec 300 oeuvres d’art moderne présentées sur les trois niveaux du musée Ludwig, ce dernier propose une exposition de grande envergure aux visiteurs.

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Dès le début de l’exposition, c’est une sensation très forte qui saisit le visiteur avec deux grandes toiles de Picasso peintes vers la fin de sa vie, notamment Le matador et la femme nue. Deux thèmes chers à l’artiste où la liberté de la facture et des contrastes colorés témoignent de son élan et de sa puissance picturale. Plus loin, il y a une troisième oeuvre de Picasso; il faut savoir que c’est le seul musée hongrois qui possède des tableaux du grand maître.

Ce nouvel accrochage permet en outre de découvrir une salle entièrement dédiée à l’art contemporain français avec notamment des oeuvres de Claude Viallat. Ce peintre nîmois est l’un des membres fondateurs du groupe Support/Surfaces et son oeuvre en incarne l’esthétique fondée sur la répétition d’une forme simple fonctionnant comme un logo. Face à une très belle toile de Hantai c’est une oeuvre de pop art qui revisite quant à elle la cour intérieure du Louvre, rappelant les techniques pointillistes des impressionnistes.

Toujours au 3ème étage, après les Picasso, l’on découvre les pièces du jeu d’échecs de Yoko Ono, toutes blanches des deux côtés de l’échiquier, puis la représentation de la partie qui s’est déroulée entre Boris Spaski et Bob Fischer, devenue tout un symbole de la lutte politique entre deux super-puissances. Les oeuvres de Yoko Ono ont été offertes au musée par son ex-mari, le Hongrois Sámuel Havadtôi qui, en rentrant des Etats-Unis, a décidé de se consacrer à sa passion pour l’art contemporain (il est président du cercle amical du musée Ludwig) et, tout en exerçant en tant qu’architecte, s’est lancé dans la réalisation d’une série d’oeuvres. Celles-ci sont proches du mouvement Fluxus, comme son propre échiquier que l’on découvre également dans l’exposition.

C’est à ce mouvement que l’on apparente l’oeuvre de Josef Beuys d’une part, mais aussi de Miklós Erdély. Comme Beuys dans son propre environnement, Erdély a joué en Hongrie le rôle d’un père pour la future génération d’artistes. Avec Dóra Maurer il a participé à l’éducation de nombreux jeunes artistes auxquels ils ont enseigné l’art conceptuel, la relation entre le langage et l’expression visuelle. On remarque ici la série de photographies de Dóra Maurer en noir et blanc (1972) : Les phases réversibles et interchangeables du mouvement. On aperçoit également le chef-d’oeuvre de Miklós Erdély: Secret militaire, réalisé à l’origine pour l’exposition Orwell de Vienne en 1984. Dans les écrits théoriques de Erdély et dans son art on voit l’influence de l’Ecole de Francfort; notamment celle d’Adorno et de Marcuse qui s’est répandue dans plusieurs pays, voire plusieurs continents après 1968. Dans Secret militaire il représente les paradoxes philosophiques et visuels d’une époque où tout devient secret, où les masse sont désinformées et ne sont pas en mesure de prendre des décisions.

Dans les grandes espaces nous voyons aussi bien le personnage agressif du Néerlandais Karel Appel, représentant de l’art informel qui tout au long de sa vie s’est exprimé comme héritier du mouvement CoBrA. Il y a aussi des oeuvres d’Américains: Roy Lichtenstein ou Andy Warhol, ce dernier étant en outre originaire d’Europe centrale. Un large éventail d’artistes d’Europe centrale et orientale y compris des Hongrois figurent également dans l’exposition. Et un vaste défilé d’artistes évoque l’esprit de 1968, avec les grilles de Gerhard Richter et le pavé de Gyula Gulyás, ironique, avec l’inscription : Made in Hungary.

On voit que ce musée est entré dans l’âge adulte depuis les 70 objets d’art reçus de la donation Pierre et Irène Ludwig d’Aix-la-Chapelle (Achen), les nombreuses acquisitions ont depuis considérablement agrandi la collection, proposant un très large aperçu de l’art contemporain. C’est l’historienne d’art Krisztina Szipôcs qui a dirigé tous les récents travaux avec les autres commissaires de l’exposition qui tous rendent hommage à Katalin Néray, directrice pendant de très longues années du Musée, décédée prématurément l’année dernière.

Éva Vámos

Ludwig Múzeum,

Komor Marcell u.1, Budapest

1er étage jusqu’au 27 janvier, 2e étage jusqu’au 10 février, 3ème étage jusqu’à la fin de l’année 2008

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