Les métamorphoses de Luc Tuymans

Les métamorphoses de Luc Tuymans

Fidèle à sa politique, le Mûcsarnok organise une série d’expositions dédiée aux grands maîtres de l’art contemporain européen. La rétrospective Luc Tuymans s’inscrit éminemment dans cette perspective . On retrouve des oeuvres de l’artiste anversois qui, à l’approche de ses 50 ans, figurent parmi les collections des plus grands musées d’art moderne, de New York à Paris .

Image retirée.

C’est enfant que Luc Tuymans se lie avec la peinture. Il étudie l’histoire de l’art et la peinture dans plusieurs écoles d’art et à l’Académie des arts en Belgique. Mais c’est en tant que cinéaste qu’il débute, avec Feu d’artifice, tourné avec des amis, et il écrit de nombreux scénarios dans les années 80. Plus tard, lorsque sa passion pour la peinture ressurgit, on remarquera l’influence du cinéma. Souvent ce sont des photos , des séquences d’un court-métrage ou d’un objet qui se métamorphosent en scènes dans sa peinture .

Sa première exposition eut lieu au célèbre Palais des Thermes à Ostende, en 1985, et récemment l’on a présenté ses toiles à la Tate Modern de Londres où il fut le premier peintre belge à être exposé de son vivant.

Luc Tuymans ne laisse rien au hasard et il tient à expliquer, voire souligner l’aspect historique et philosophique de son oeuvre que le visiteur peut ainsi lire successivement dans chaque salle. C’est la réalité fracturée qui apparaît dans sa série Diagnostics où il transforme les images d’un manuel médical à sa manière.

Il utilise des couleurs tristes et froides en évoquant les camps de concentration durant la Seconde Guerre mondiale, y compris la copie d’un journal de la propagande nazi avec le portrait de Heydrich, le protecteur du Reich en Bohème et Moravie, ou bien la feuille ou les deux chaises rappellent l’intérieur du bunker d’Hitler. Dans une série photographique il évoque le cimetière juif de Prague, la tristement célèbre Waterloo et le port d’Anvers. La toile titrée Suicide, où le visage de l’homme est caché, nous rappelle le côté existentialiste du peintre. Avec lui, même le coeur perd ses contours et ses couleurs et devient symbole du deuil. Le coucher du soleil serait un lever du soleil tout gris .

Pourtant, à ses débuts sa peinture était très colorée. On voit ainsi les jolis motifs Art déco de la tapisserie d’un restaurant de Berlin, au début du siècle dernier, d’où un diplomate belge a envoyé ses cartes postales à son épouse. Dans un autre registre, il prend la figure d’une marionnette venant du Musée du Carnaval et du masque devant l’arbre de Noël pris en Polaroïd. Puis on retrouve des couleurs dans sa recherche de Bruegel dans les scènes paranoïaques de la guerre au retour du voyage aux USA après le 11 septembre.

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Dans sa série Heimat (Patrie), il s’attaque au nationalisme de son pays. Il revient sur les lieux ayant une symbolique très controversée où des nationalistes se sont rassemblés après la guerre.

Sans oublier les toiles qui témoignent de son sens du grotesque, comme l’image figée des singes exposés dans des musées japonais comme symbole de fertilité.

Luc Tuymans vit pleinement notre époque. Souvent désespéré, c’est la création qui le sauve. Comme il l’explique, le chemin était long pour arriver à être un artiste reconnu sur le marché de l’art, ce qui nourrit en lui des sentiments très ambigus .

Éva Vámos

Mûcsarnok,

Hôsök tere

tlj sauf lundi, de 10h00 à 18h00,

jeudi de 12h à 20h

Jusqu’au 10 février

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