Les conséquences de la hausse du cours du forint
La contraction de l'économie européenne est largement supérieure à celle des Etats-Unis, d'où est pourtant partie la crise financière, à l'origine aujourd'hui d'une récession mondiale sans précédent depuis 1945. L'Union européenne dans son ensemble a également enregistré une contraction de son économie de 2,5 % sur un mois, après un repli de 1,5 % au trimestre précédent. Sur un an, le recul est de 4,4 %. C'est pourtant dans les pays d'europe centrale et orientale que la situation est la plus critique. En Hongrie, le PIB a diminué de 2,3 % au 1er trimestre de l'an 2009 par rapport au trimestre précédent.
Selon de nombreuses analyses économiques le forint est, en 2009, l'une des monnaies les moins performantes parmi les pays de la région. Pendant de longues semaines du 1er trimestre un euro valait plus de 300 HUF. Les nombreux ménages dont les emprunts sont indexés sur l’euro ou le franc suisse voyaient leur capacité de remboursement menacée. Cela ne bénéficie même pas aux exportations qui sont réduites en raison du contexte économique global, crise qui bloque le crédit et les investissements. Or l’économie hongroise dépend, comme chacun sait, beaucoup des investissements directs étrangers. «Etant donné que les banques les plus importantes sont étrangères – constate András Vértes, directeur du think tank économique GKI Economic Research, en faisant référence à Unicredit, KBC ou Intensa Sanpaolo – à partir du moment où les pays d’origine de ces banques ont eu des problèmes de liquidité dû à la crise des subprimes, les capitaux qui maintenaient la Hongrie se sont volatilisés et les banques ne sont plus disposées à accorder de prêts». Et le pire reste à venir car, selon la société d’analyse financière Standard & Poors, le PIB hongrois va baisser de 6 % en 2009. Cela pourrait bien justifier les annonces du Premier Ministre hongrois, Gordon Bajnai, qui prévoit un plan d’austérité réduisant les dépenses du gouvernement de l’ordre de 1 milliard d’euros.
Selon les experts financiers, les erreurs ont été commises il y a quelques années (en 2003 et 2004) alors que la Hongrie voyait son économie en quasi-surchauffe avec une inflation élevée. Les taux d’intérêt en monnaie nationale, le forint, l’étaient donc aussi. Les banques hongroises, presque toutes contrôlées par des établissements étrangers, ont commencé à prêter en devises étrangères, à des taux défiant toute concurrence. Ainsi une gigantesque bulle du crédit aux particuliers s’est constituée, en francs suisses, en euros, et même en yens!
Et puis tout s’est écroulé : en octobre, la Hongrie a été la première en Europe à subir la tempête financière amorcée à Wall Street. Acculé, Budapest obtenait en urgence une bouée de sauvetage pour éviter la banqueroute de l’Etat, sous la forme d’une facilité de crédit de 20 milliards de dollars, allongés par le FMI, la Banque mondiale et l’Union européenne. Avec une conséquence immédiate, l’effondrement du forint. Et son corollaire sur le budget des ménages magyars : l’explosion du service de leurs dettes auprès des banques (+ 40% en moyenne). Du coup, plombés par la récession et le surendettement, les ménages magyars subissent la crise de plein fouet.
Aujourd'hui environ 750 000 hongrois sont concernés par un emprunt en devises étrangères. 40% d'entre eux sont incapables de payer depuis des mois tant les frais ont augmenté pour les mêmes services auprès des banques. Le gouvernement a promis d'aider ses familles en demandant aux banques concernées de garder les conditions originelles et allonger plutôt la durée du remboursement. Les experts financiers hongrois disent que les seuls gagnants de cette période difficile sont les entreprises étrangères essentiellement importatrices qui gèrent leurs chiffres d'affaires en euros.
Bálint Seres