Le point sur les biocarburants
Les biocarburants sont à la mode. Ces carburants, obtenus à partir de matériaux organiques traités, puis mélangés, ou non, à une faible quantité d’essence ou de gazole, ont le vent en poupe. De George Bush à Al Gore, en passant par Richard Branson, leurs partisans ne manquent pas. Néanmoins, malgré les progrès réalisés et les alternatives à l’étude, de nombreux problèmes restent à résoudre avant qu’il soit possible de considérer que les biocarburants présentent un avantage sur les carburants d’origine fossile.
De l’huile à l’éthanol cellulosique
En théorie, il est possible de fabriquer du carburant avec quasiment n’importe quoi, mais tous les matériaux n’offrent pas la même efficacité.
Une solution possible est d’obtenir un produit issu de plantes oléifères. Cette huile obtenue par pressage lourd peut faire fonctionner des moteurs diesels modifiés et ses résidus sont fortement biodégradables. Ainsi, l’huile de palme est considérée comme un des produits d’origine végétale les plus prometteurs.
Il est aussi possible de faire fonctionner des moteurs avec de l’alcool obtenu par fermentation et traitement de certains végétaux. Le produit obtenu est l’éthanol, sujet dont les médias sont friands comme vous pouvez le constater.
L’éthanol peut être obtenu à partir de plusieurs végétaux (en gros c’est de la gnôle) maïs, blé, canne à sucre, colza, j’en passe et des moins bons. Le problème des agrocarburants est double : pour cultiver une plante il faut non seulement une grande surface cultivable, mais aussi… du carburant.
C’est ici que les biocarburants deviennent moins bios, s’il faut détruire la forêt amazonienne pour produire de la canne à sucre, le Brésil deviendra sûrement un grand exportateur d’éthanol, mais les problèmes environnementaux qui en résulteront nous ferons regretter le bon vieux pétrole. Je tiens à vous préciser que les conditions de travail des producteurs de canne à sucre ne sont pas spécialement roses, je ne vous parle même pas des populations expulsées. Détruire des écosystèmes entiers pour protéger l’environnement, cela ne semble pas très logique.
Il n’y a pas que la canne à sucre ou l’huile de palme, me direz-vous, et les conditions de travail des producteurs américains de maïs ou de blé ne font rougir personne. Malheureusement, nous devons aussi manger. Du fait de la demande en maïs pour la production d’éthanol, les prix ont atteint leur plus haut niveau depuis dix ans. Dans le même temps, les agriculteurs délaissant d’autres produits comme le riz et, dans une moindre mesure, le blé, les prix de ces denrées augmentent aussi. Nous assistons, d’une manière générale, à une hausse globale du prix des matières premières à destination de l’industrie agroalimentaire qui pourrait avoir des conséquences désastreuses sur l’économie mondiale.
Pour résoudre ce problème, les scientifiques ont mis au point un éthanol basé sur la cellulose (glucose polymère présent dans tous les végétaux et déjà utilisé pour la fabrication du papier), l’éthanol cellulosique. Cet éthanol peut donc être produit avec toutes sortes de déchets agricoles ou forestiers. Ce procédé des plus avantageux est malheureusement très complexe à mettre en œuvre et implique de nombreuses étapes intermédiaires qui induisent un surcoût de production. La Suède est le pays qui fonde le plus d’espoirs sur ce procédé grâce auquel il entend assurer d’ici quelques dizaines d’années son indépendance énergétique.
A propos des gaz à effet de serre
En plus de l’indépendance énergétique, un des buts avoués du recours aux biocarburants est la diminution de la production globale de gaz à effet de serre.
Dans ce domaine, il est déjà clair que les résultats sont loin d’être satisfaisants. Produire des matières végétales consomme de l’énergie. Ainsi, produire un Mégajoule d’énergie avec de l’éthanol de blé ou de betterave consomme 0,5 Mégajoule d’énergie non renouvelable. Même si d’autres plantes ont un meilleur rendement, il reste le problème de l’azote utilisé dans les cultures et celui des gaz issus de la combustion des biocarburants.
Les chercheurs demandent aux environnementalistes et au grand public de ne pas enrayer l’élan actuel pour les biocarburants car notre avenir est en jeu, mais n’existe-t-il pas d’autres solutions ?
Hydrogène et compagnie
Puisque le charbon liquide propre n’est pas pour demain et que le solaire n’est pas vraiment performant, penchons-nous sur l’hydrogène.
L’hydrogène dans les transports apparaît comme une solution séduisante sur le plan de l’indépendance énergétique. En ce qui concerne l’efficacité du moteur à hydrogène, celui-ci reste actuellement 85% moins performant que le moteur à essence, il ne semble donc pas promis à un grand avenir.
Par contre, l’alimentation d’un moteur électrique fonctionnant avec une pile à combustible à hydrogène est seulement 50% moins efficace qu’un moteur à essence. De nombreux véhicules fonctionnant selon ce principe sont en expérimentation, y compris en France. Néanmoins, en ce qui concerne le respect de l’environnement, il y a un hic car produire de l’hydrogène induit toujours des rejets de C02 même si ceux-ci sont moindres qu’avec un carburant classique. De plus, l’utilisation de l’hydrogène implique aussi des rejets d’azote. Et pour couronner le tout, ce procédé est, pour l’instant tout au moins, très onéreux.
Du biocarburant à base de jatropha à l’hydrogène, toutes les solutions pour pallier à l’épuisement des gisements pétroliers et aux problèmes d’approvisionnements sont à l’étude. Soucieux de préserver notre environnement, les chercheurs tentent de découvrir un carburant dont l’utilisation présenterait un impact minimal sur notre écosystème global. Comme l’écrivait récemment Stéphane Lauer dans Le Monde, en évoquant les réticences qu’avaient les Américains à rouler au diesel : «Tout est une question de temps».
Xavier Glangeaud