Le miroir de l’âme
A la rencontre de François Brunhes
«A quoi sert d’être sensible, si cela ne naît pas en poème ?», voilà en quelques mots les méditations de François Brunhes qui a consacré un recueil de poèmes «les contemplations du pauvre» à exprimer ce langage de l’âme, de la Chine à la Hongrie en passant par l’Auvergne, comme témoin de ce monde.
Cet homme d’affaire français, autodidacte, ne s’est pas mis à l’écriture par hasard même s’il précise que «rien ne vous pousse à écrire». C’est à l’adolescence, marqué par une enfance difficile, qu’il commence à prendre la plume. Mais pour lui l’écriture est avant tout un don qui vient de Dieu. Il avoue que lui même a été surpris de cette attirance innée pour l’écriture. «Les contemplations du pauvre, c’est avant tout être témoin, savoir s’appauvrir - dans le sens de l’hanonymat- car l’homme en soi est peu de chose. La contemplation est perçue comme un état d’alerte, ce n’est pas de l’oisiveté».
L’écriture pour François Brunhes, c’est également transmettre : «je l’ai fait d’abord pour mes deux enfants». Ce devoir de transmission, il l’a appris auprès des moines trappistes qui ont su toucher son âme et lui ont enseigné le monde de l’invisible, ce monde qui nous dépasse, quand adolescent, en opposition à une famille bourgeoise, il cherchait sa route.
Cette crise a été une sorte d’alerte et surtout un retour à la spiritualité. C’est à travers la poésie qu’il l’exprime aujourd’hui en expliquant qu’il s’agit du «langage compliqué de l’âme». Mais la poésie, c’est aussi «un dépouillement, des sentiments et une absence de sentiments».
Le chapitre «encre de Chine» fait renaître ses années passées à Xi’an comme professeur de français, puis ses débuts dans le monde des affaires, dans une banque, des années riches en expériences, en découverte. Il apprend cette langue complexe, pleine de symboles, cette culture différente. Il en retient des interstices, des touches de couleurs, des sensations : «la nuit se retirait peu à peu. Kumming respirait de son sommeil, les montagnes environnantes n’apparaissaient que dans leurs faibles contours, pour peu à peu se dévoiler...». Il exprime cette sensibilité à fleur de peau, toutes ces choses qui l’ont imprégnées tout en soulignant que l’écriture n’est pas un exutoire. Il cite d’ailleurs Paul Valéry «je préfère mille fois écrire quelque chose de moins bon mais dans la sérénité que quelque chose de sublime dans l’excitation et l’instant».
Son oncle, Alain Lorraine, poète d’origine réunionnaise, fut également une référence pour lui. Il incarne cet héritage familial qui lui est cher, qui lui a manqué. Un héritage artistique que sa mère aussi a exprimé à travers la peinture, une expression fragile et dissimulée toutefois. Il dédie à cet oncle admiré un poème : «(..) Puisque ton héritage, de faire parler les mots, pleurer les montagnes, ou rire les fleuves nous revient, nous y veillerons, comme veiller sur un enfant qui dort».
Après la Chine, il fit un retour pour quelques temps à Clermont-Ferrand, le temps de réaliser son sentiment d’être un étranger même en France. C’est en Hongrie qu’il poursuit désormais son aventure d’homme d’affaire et de poète. C’est là aussi qu’il s’est posé ; «poser» est d’ailleurs le dernier poème de ce recueil : «Poser ses souffrances et avancer, se poser à un endroit calme et serein, et y faire demeure...».
Les poèmes de ce recueil s’enchaînent, nous emportent, au gré des voyages et de la sensibilité de l’auteur.
Gwenaëlle Thomas
François Brunhes
Les contemplations du pauvre
Editions Amalthée