Le marché de la Bande Dessinée

On assiste depuis deux à trois ans déjà en Hongrie au renouveau de la bande dessinée, ou plus exactement à sa naissance. On doit l'apparition de ce nouveau marché à la création de maisons d'édition spécialisées, celles-ci n'existant jusqu'alors qu'à titre confidentiel.

Cette tardive naissance du marché de la bande dessinée est notamment due au désamour que le régime communiste portait à cet art. L'un des commissaires culturels soviétiques en poste en Hongrie, le camarade Finogenov, avait ainsi déclaré que la BD était une sorte «de déchet culturel» et, en raison de sa violence présumée et de ses influences américaines, «un véritable danger pour la société». C'est pour cette raison que les adaptations littéraires dessinées ont alors été préférées aux véritables BD, longtemps tombées en désuetude.

Ce n'est que vers 2005 que certaines maisons d'éditions ont redécouvert l'univers de la BD et depuis lors le nombre des bandes dessinées publiées est passé de 10 à 200 par an. C'est également début 2005 que s'est créée une association des maisons d'édition de BD. Elle comptait alors cinq membres contre une quinzaine dès la fin de la première année et une vingtaine aujourd'hui.

Toutefois, ceux qui ont initié cette nouvelle tendance étaient, et restent pour l'essentiel, des éditeurs amateurs. En effet, malgré cet engouement, la place des BD sur le marché du livre n'a pas encore atteint le cap des 1% et les grandes librairies de Budapest n'ont pas encore découvert cet univers. Ainsi, lors de la publication de Maus en hongrois, l’ouvrage a été classé au rayon des livres... pour enfants ! Sans aucun doute la Hongrie aurait-elle besoin d'un vrai investisseur dans ce domaine, mais jusqu'à présent aucune grande maison d'édition n'a manifesté un vif intérêt pour ce secteur.

Il existe désormais à Budapest une librairie exclusivement spécialisée dans la BD, Eduard, ouverte depuis septembre. Le grand-père du propriétaire était l'un des plus célèbres graphistes de bande dessinée dans les années 70' et a dessiné de nombreuses adaptations littéraires. Cette boutique a commencé en proposant des éditions renouvelées des BD de ce graphiste avant d'élargir son offre. Persepolis, en vente en Hongrie depuis le 16 novembre dernier, est un bon exemple du renouveau du genre. Son éditeur, Ádám Halmos de la maison Nyitott Könyvmûhely kiadó, pense en effet que la seule possibilité de réanimer ce marché est de publier de plus en plus de bandes dessinées artistiques, des «graphic novels».

En revanche, les BD hongroises se font rares, sans doute car les dessinateurs et les écrivains n'ont pas encore eu l'idée ou l'opportunité de collaborer à la création d'une bande dessinée.

Il existe pourtant une association des dessinateurs hongrois de bandes dessinées, qui édite ses propres journaux à raison de quelques centaines d'exemplaires chaque trimestre. Seul le dessinateur Balázs Gróf, qui publie chaque semaine une très courte BD dans le Pesti Est, commence à être connu et reconnu. Mais il n'existe pas encore à l'heure actuelle de BD culte, ce qui manque à n'en pas douter à la reconnaissance de cet art.

Judit Zeisler

et Frédérique Lemerre

Eduard, une librairie exclusivement consacrée à la BD:

8 Dalszínház utca, 6e arrt. Budapest

Galerie kArton, une galerie spécialisée dans la BD

18 Alkotmány utca, 5e arrt.

Hungarocomix, le festival et marché de la BD

Le 2 décembre, toute la journée

au centre culturel Aranytíz

10 rue Aranytíz, 5e arrt.