LA HONGRIE FAIT VÉLIB’RER PARIS

LA HONGRIE FAIT VÉLIB’RER PARIS

S’il y a bien eu cet été à Paris un mot magique comme un « Sésame ouvre - toi » c’est bien celui de Vélib’.

Au centre de toutes les conversations de comptoirs, les premiers 10 648 vélos mis en libre-service payant par la Mairie le 15 juillet furent incontestablement les stars d’un été pourtant pluvieux et frisquet. Et les Parisiens stupéfaits de découvrir qu’aller prendre la Bastille de tous les points de la capitale en moins de trente minutes leur serait désormais une promenade de santé. À vos Vélib’ Citoyens!

Oui, mais - car il y a toujours un mais - pour avoir le privilège de chevaucher un de ces épais coursiers (ils pèsent quand même 22kgs) mieux vaut être : malin, agile, patient, tenace, rapide comme l’éclair et «szuper» costaud. En résumé être un alpha mâle ou une alpha femelle prêts à rouler sur la tête de tout le monde. Ainsi, en quatre jours de chasse au Vélib’ dans les hautes plaines du bitume parisien, j’ai vu de tout en matière de vandalisme gratuit et d’individualisme sauvage.

C’est un peu comme une gigantesque fratrie en train de se battre à guidons tirés pour ce dernier joujou au cœur de toutes les convoitises. C’est parfois drôle, c’est parfois triste mais toujours vivant, bruyant, bruissant et… très parigot tête de veau. Pour vous donner quelques exemples pris à la volée j’ai vu dans le désordre le plus total :

  • Un cadre sup bloquer « son » Vélib’ par un cadenas personnel à une station rue des Martyrs pour être sûr de le retrouver le lendemain matin en partant bosser.

  • Une bande de marlous s’acharner à arracher une selle comme un trophée (La Mairie de Paris associée sur ce projet à l’entreprise JC Decaux avouait déjà mi-août le vol d’une centaine de vélos et la dégradation irrémédiable par vandalisme d’environ 200 vélos.)

  • Une touriste effarée se faire souffler son Vélib’ sous le nez alors qu’elle venait de réussir à le déverrouiller sur une borne d’enregistrement et que le facétieux resquilleur lui lançait un vibrant Thank-You . Il faut dire que la procédure informatique pour retirer un vélo est un vrai parcours du combattant. Le système est compliqué et déraille régulièrement (5% de bugs avoués, mais à mon avis bien 15 de plus à moitié pardonnés…) .

  • Une violente prise de bec entre une bande de jeunes plutôt naturellement pacifiques et un quadra surexcité qui avait complètement perdu les pédales en tentant de faire prévaloir son droit d’aînesse à une station. Pendant ce temps-là, je l’avoue, j’en ai profité pour filer à l’anglaise en retirant le dernier vélo au centre de la dispute…

Donc somme toute comme vous le voyez, rien de bien nouveau sous le ciel de Paris où comme toujours, ses habitants restent fidèles à leur mauvaise réputation. Mais ce qu’ils ignorent souvent et que je n’ai pu m’empêcher de clamer fièrement sur tous les toits, c’est d’où leur arrivent ces fameux Vélib’ qui les font tant vibrer. Certes le design très massif est français mais c’est bien en Hongrie au sud de Szolnok qu’ils sont fabriqués et assemblés dans une usine de cycle. Ainsi, les coursiers sont made in Magyarország et on peut donc dire que le village de Toszeg fait aujourd’hui pédaler tout Paris.

Et pour ceux qui déplorent qu’il n’y ait pas aussi de coûteux système Vélib’à Budapest, je leur dirai que c’est peut-être parce que ce n’est pas bien sorcier de dégotter ici un biclou à louer ou à acheter. En sus, il y a beaucoup moins de risques qu’à Paris de se faire renverser par un scooter, de retrouver son vélo complètement désossé en sortant d’un kert ou de se battre à une station. Se déplacer dans Pest, c’est authentiquement simple comme un coup de pédale !

Marie-Pia Garnier

 

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