Jusqu'à la garde
Un film et une activiste qui s’inscrivent dans l’è normal">re du temps
C’est dans l’amphithéâtre de l’institut Français, que le film “Jusqu’à la garde” a été projeté samedi dernier.
Le film débute par un jugement dans une salle de réunion d’un palais de justice. Miriam (Léa Drucker) et Antoine (Denis Ménochet) sont en plein divorce et il est question de la garde de Julien. C’est la garde exclusive que la mère demande pour protéger son fils. Le juge est perdu entre les arguments de la mère dénonçant les harcèlements dont elle-même et les enfants sont victimes, et ceux du père, qui semble être dans l’incompréhension et revendique son droit de voir son fils. C’est finalement la garde partagée qui va s’imposer.
Du haut de ces 11 ans, Julien se retrouve avec une grande responsabilité sur ses épaules, celle de garder l’adresse du nouveau habitat de sa mère afin d’éviter le pire. Meurtri du comportement de son ex-femme, qui est tétanisée par le risque d’intrusion, c’est à travers son fils qu’il essaye d’avoir des informations sur son ex-compagne.
Une tension palpable prend le spectateur par la gorge et le maintien dans une position désagréable pour une longue durée. La Renault, élément clé de beaucoup de scène, dans laquelle le père emmène et dépose son fils devant la porte de ses beaux-parents, symbolise la prison dans lequel Julien se trouve. Par obligation, et de peur des représailles, il doit apporter des questions au réponses de son père qui devient de plus en plus insistant. Alors qu’au début du film, on ne se doute pas de la violence dont le mari est capable, on découvre peu à peu derrière le père incompris, un homme qui ne contrôle pas ses pulsions et avide de revanche. En effet, Xavier Legrand aborde dans ce film, la violence conjugale.
Le réalisateur nous montre une histoire d’abord neutre, dont on ne connait pas le passé, puis nous fait découvrir le véritable visage que se cache derrière ce drame familiale.
Alors que le début est long, la fin part très vite en crescendo, et dévoile la gravité du comportement du père. Le silence qui dominait les scènes, se fait brutalement remplacer par la violence.
Un problème qui est malheureusement le quotidien de beaucoup de femmes notamment hongroises. Éva Gerle, activiste, dénonce dans son blog les violences conjugales souvent cachées derrière la manipulation et le harcèlement psychologique. Son passé l’a poussé à parler du sujet et de casser le tabou qui règne dans la société hongroise.
Porter un œil sur le film à travers les yeux d’Eva, nous plonge dans l’anxiété d’une femme subissant les pressions et le harcèlement, qui ne peut pas prouver devant la loi le cauchemar qu’elle et ses enfants sont amenés à vivre.
« Tant qu’il n’y a pas de sang, la police n’intervient que très rarement pas dans la vie privée de couple. Cependant, ce qu’on l’ignore souvent, c’est que la violence domestique se manifeste surtout par la pression psychologique. » décrit Éva. Le calme de Léa Drucker dans le film, qui peut paraître comme une faiblesse, la bloggeuse l’interprète comme une stratégie, aucun moyen pour Miriam de s’échapper, elle est emprisonnée et ne peut se défendre, son mari étant doté d’une force physique menaçante.
Dans une société patriarchique, dit-elle, les juges sont souvent en faveur du père, malgré les comportements abusifs que certains peuvent avoir. La femme, étant souvent au foyer ou ayant un travail moins bien payé, se fait souvent pas comprendre, car c’est un problème que l’on préfère ignorer et c’est pourquoi Éva n’a pas fini de se battre.
Aujourd’hui, Éva s’épanouie dans le sport, qui lui donne une carrure moins vulnérable et lui permet de gagner en confiance et en force. Un thème, un film et une activiste qui s’inscrivent dans les revendications féministes qui récemment percent dans l’actualité.
Lisa Coiffard
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