Iván Fischer et l´Orchestre du Festival de Budapest (BFZ) : une mise en bouche avant d´aborder la saison 2019-2020
Il l´appelle son „appartement de scène” (színházlakás) : le logement de famille où Iván Fischer passa son enfance, situé face à l´Opéra. Bien qu´il n´y réside plus, le chef hongrois a décidé de le garder tel quel pour en faire un lieu de rencontres. D´autant plus accueillant qu´il offre un cadre intime.
C´est là que le chef hongrois nous a reçus autour d´une collation pour nous présenter le programme de l´orchestre du Festival de Budapest (BFZ) pour la saison 2019-20. En compagnie de son nouveau directeur, l’Allemand Martin Hoffmann et de son adjointe Orsolya Erdődy. Présentation de presse marquée par le mot de ralliement : „Partageons pleinement la communauté !” („Éljük át a közösséget!”), leitmotiv choisi pour accompagner cette nouvelle saison.
Pour commencer, Iván Fischer nous annonce le pays qui sera à l´honneur lors de la prochaine saison dans le cadre de la campagne „passerelles en Europe” : l´Italie. Et, pour débuter cette „saison italienne”, rien moins que l’Orfeo de Monteverdi, encore jamais donné à Budapest. Un opéra que non seulement il dirigera et mettra en scène, mais pour lequel Iván Fischer apportera également sa contribution en tant que compositeur, ayant reconstitué lui-même la fin de l´œuvre (laissée inachevée). Avec une affiche alléchante en tête de laquelle figurent les noms de la soprano hongroise Emőke Baráth, bien connue du public parisien (1), et du ténor italien Valerio Contaldo dans les deux rôles principaux. A mentionner encore : une chorégraphie due à la scénariste flamande Sigrid T´Hooft, spécialiste reconnue de la danse baroque. Une production qui sera également présentée en octobre au festival de Vincenza (Teatro Olimpico) et au public du Grand Théâtre de Genève. Orfeo, une œuvre que le chef semble avoir particulièrement à cœur, placée, selon ses mots, sous le signe de la catharsis, autrement dit de la renaissance. Renaissance d´une œuvre tirée de l´Antiquité. Mais renaissance également par la reprise de cet usage des Anciens qui faisaient renaître leurs héros et ponctuaient généralement la représentation de leurs tragédies par un divertissement, comme pour conjurer le drame (2).
Une apparition inédite dans cette saison italienne : la propre fille du chef, la chanteuse Nora Fischer, qui interprètera des chants de Luciano Berio. A l´affiche, également, Respighi.
Une saison 2019-20 qui sera par ailleurs marquée par la participation accrue de chefs et solistes étrangers de renom : de la pianiste Elisabeth Leonskaja au violoniste Renaud Capuçon en passant par la violoniste moldave Patricia Kopatchinskaia, le violoncelliste norvégien Truls Mørk et sa compatriote, la violoniste Vilde Frang. Parmi les chefs invités : Jordi Savall, Marek Janowski, Dmitri Kitaenko, l’Israélien Lahav Shani et Joanathan Cohen.
Une forte participation étrangère, donc, mais aussi une forte présence à l´étranger. Avec des tournées qui, „de Hollywood (Los Angeles) à la Baltique (Vilnius, Tallinn, Riga)”, comprendront 40 concerts dans une vingtaine de villes réparties sur quinze pays, du Lincoln Center de New York au Barbican de Londres en passant par la Philharmonie de Paris (le 19 mai).
Quant au fameux „marathon”, journée de concerts non-stop organisée en chaque début d´année, il sera consacré le 2 février à Beethoven dont on célèbrera le 250ème anniversaire de la naissance. Pour le reste, poursuite des activités „hors les murs” pour aller au-devant des jeunes et plus jeunes, des familles, des malades et autistes, dans les villes et bourgades de province, dans les églises et synagogues. Sans oublier le „concert surprise” de Noël ni, surtout, le temps fort de l´année : ce fameux „concert public dansant” (TérTáncKoncert) où des dizaines d´enfants issus de milieux défavorisés viendront en juin danser au son de la VIIème de Beethoven sur le parvis de la Basilique.
Comme l´on voit : une saison 2019-2020 riche en événements et nouveautés, ce qui n´est pas pour surprendre les habitués d´Iván Fischer et de ses musiciens.
Pour terminer, Martin Hoffmann, nouveau directeur de l´orchestre, qui fut auparavant intendant de la Philharmonie de Berlin, puis directeur de la chaîne SAT1, nous confie, parmi les mille motivations qui l´ont amené à rejoindre la formation, son admiration pour la qualité et le renom de l´ensemble, bien sûr, mais aussi pour les relations étroites nouées de longue date avec Iván Fischer lors de ses nombreux passages à Berlin (3).
Une saison 2019-2020 qui nous promet de bien beaux moments….
Pierre Waline
(1): Emőke Baráth qui se produit cette saison au Théâtre des Champs-Elysées. Dans un autre Orphée, celui de Gluck.
(2): selon les versions, l´opéra comprend deux dénouements opposés: Orphée se faisant massacrer par les Ménades ou, au contraire, étant emmené par Apollon dans l´Olympe d´où il pourra contempler à loisir l´image de son Eurydice dans les étoiles..
(3): Iván Fischer étant également chef invité permanent au Konzerthaus de Berlin.
Photo 2 : Nora Fischer photographiée par Sarah Wijzenbeek