Festival du film belge
Le JFB a rencontré Mathieu Labeau, organisateur du Festival du film belge Wallonie-Bruxelles
JFB : Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Mathieu Labeau : Je suis lecteur à ELTE (faculté des sciences humaines) pour la communauté française de Belgique. Je donne des cours de langue et de civilisation, parmi lesquels un cours de cinéma.
JFB : Comment est née l’idée de ce festival ?
M.L. : L’idée du festival est née il y a trois ans d’une rencontre avec Isabel Tuyls, lectrice flamande. Nous nous sommes demandé ce qui pouvait regrouper nos deux communautés, et nous avons trouvé que le film serait un bon moyen. La première année, cela a très bien fonctionné. La deuxième année, les Flamands se sont retirés car ils voulaient organiser leur propre festival. J’organise cette année la troisième édition avec les lecteurs de Pécs et Szeged, Vanessa Crine et Sorin Stan.
JFB : Avec quels partenaires organisez-vous le festival ?
M.L. : Les organisateurs sont la Communauté française de Belgique et Wallonie-Bruxelles International. L’ambassade est partenaire également. Brussels Airlines nous soutient aussi depuis trois ans. Pour les salles, nous travaillons avec Budapest Film qui possède les cinémas Corvin, Puskin, Szinbád et le Mûvész. En fonction des disponibilités nous changeons de cinéma, mais c’est toujours avec les mêmes partenaires.
JFB : Comment choisissez-vous les films que vous allez diffuser ? Quels critères guident votre sélection ?
M.L. : On choisit les films au coup de cœur. On regarde les films ensemble, durant des journées entières et on choisit en fonction de ce qui nous plait et également de ce qui peut passer auprès du public hongrois.
On prend garde à ne pas tomber dans des choses trop choquantes ou scatologiques, ce qui peut être l’apanage de certains de nos réalisateurs, surtout dans les courts-métrages. On essaie de donner des films qui sont esthétiquement intéressants et qui témoignent d’une envie de raconter quelque chose. On ne veut pas tomber dans le « morceau d’art ». Les réalisateurs belges, francophones en particulier, sont en général de très bons photographes, de bons cadreurs, on trouve chez eux un grand amour de l’image ce qui donne des films très réussis au niveau de l’image. On veut également montrer une production qui se différencie de la France. Car même si elle est en français, il y a vraie tradition belge, disons, de l’ironie, d’un humour particulier, voire parfois assez violent. Une certaine liberté d’expression, aussi, qu’on retrouve peut-être moins dans les productions françaises courantes. Cette année, toutefois, on a dans la sélection un film qui rejoint plus l’humour français. Il s’agit de Comme tout le monde. Pour moi, c’est vraiment une comédie à la française. L’humour belge est plus noir, il peut être un peu triste.
JFB : Pouvez-vous nous parler du déroulement des éditions précédentes du festival ? Quel bilan en faites-vous?
M.L. : La première édition, au Puskin, a eu énormément de succès. La deuxième a eu aussi du succès, mais la programmation était peut-être un peu plus cinéphile, avec de l’animation notamment. Cette année il n’y aura pas d’animation mais des courts et longs métrages. Comme chaque année il y aura également un film « classique ». Il s’agit cette année d’un film récent, Si le vent soulève les sables, mais réalisé par Marion Hansel, une réalisatrice confirmée.
Le bilan est très positif pour les années passées. Le frein qu’avait pu être l’entrée de 1000 HUF l’année dernière disparaît, puisque cette année, tous les films sont gratuits. Nous proposons aux spectateurs un doublage en hongrois avec un casque.
JFB : Quels sont vos meilleurs souvenirs du festival ?
M.L. : Il y a évidemment l’ouverture du premier festival, moment intense. Et puis ce sont les rencontres humaines que j’ai faites, avec les deux réalisateurs qui sont venus les années précédentes. Frédéric Fonteyne, qui est à moitié hongrois : on l’a emmené à Szentendre, la ville de sa grand-mère, c’était un moment sympa. La rencontre avec Harry Cleven était exceptionnelle aussi. Et puis voir l’enthousiasme que cela crée chez les étudiants. J’essaie toujours de créer une interaction entres le festival et les étudiants. Ce sont eux qui traduisent les films et viennent faire le doublage. Ils sont présents à l’accueil. Quand un réalisateur vient, il donne une conférence à l’université.
JFB : Avez-vous un film préféré dans cette sélection ?
M.L. : Mon coup de cœur c’est Cages, qui sera présenté le vendredi soir. Le réalisateur, Olivier Masset-Depasse, manie la caméra d’une manière extraordinaire. Il travaille sur la difficulté à communiquer. Le film raconte l’histoire d’une personne qui a un accident à la suite duquel elle arrive très difficilement à s’exprimer. Cela va détruire petit à petit l’amour de sa vie. Tout cela se passe dans un univers extraordinaire qui est celui des falaises du cap Blanc Nez et du cap Gris Nez, à la frontière entre le nord de la France et la Belgique. Le lieu donne une atmosphère et des images magnifiques au film. Cela fonctionne très bien parce qu’on ne tombe pas dans un drame psychologique ennuyeux ; on est porté par l’image et les acteurs exceptionnels, dont Anne Coessens, l’actrice fétiche d’Olivier Masset-Depasse.
JFB : Y a-t-il des préoccupations thématiques communes aux films diffusés, ou une tendance esthétique repérable ?
M.L. : La programmation est éclectique. Elle se base sur des coups de cœur et des envies de montrer des choses plutôt que sur des thèmes qui nous bloqueraient parce que la production du cinéma belge francophone n’est pas si importante que cela. On doit en être à une quinzaine de longs métrages par an. Il y a énormément de qualité, c’est pourquoi je suis totalement convaincu par ce que je fais, mais on ne peut pas se mettre de barrières avec un thème.
JFB : De quoi rêvez-vous pour les futures éditions du festival ?
M.L. : Mon rêve serait qu’à chaque festival il y ait une première. L’objectif à moyen terme serait également de diffuser les films belges ici, au moyen d’une politique de diffusion plus grande.
Alexis Courtial
Le Festival du film belge Wallonie-Bruxelles a lieu du 10 au 16 novembre. A Budapest, les films sont diffusés au Müvész à partir du mercredi 12 novembre à 20h. Entrée gratuite.
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