Fashion street?
Á Budapest tous les chemins mènent à la place Deák et encore plus à la rue homonyme. Celle que l’on nomme Fashion street est, de fait, très bien située, au centre du centre ville. Fashion street : la seule rue portant un surnom anglais á Budapest, un passage jadis sans réel caractère avec quelques immeubles art nouveau magnifiques certes, mais que l’on pouvaient trouver partout ailleurs a Budapest.
Puis, soudainement l’endroit a pris une fonction bien définie, s’est métamorphosé. Avec un objectif transparent comme ses vitres qui se sont multipliées : présenter un large éventail de magasins de vêtement de marque, premièrement aux touristes et éventuellement aux Hongrois les plus aisés, à l’exemple de Regent Street a Londres ou de la Via Montenapoleone a Milan, le naturel en moins. Les anciens magasins, ou boutiques comme Fotex, Outlet... café Mozart ont vite été remplacés par des commerces plus chics et plus chers : Byblos, Hugo Boss, Tommy Hilfiger, Mexx, Lloyd, Benetton, Sisley, Furla, Daniele Alessandrini, Lacoste. Vapiano, Friday’s, Planet Sushi et le Vodafone SmartStore, Starbucks remplaçant Coffee Heaven, (tiens... déjà le septième à Budapest !) répondant ainsi à un vrai souhait des rares Hongrois qui allaient faire leur shopping à Vienne, voire à Prague depuis les années. La rue accueille aussi les nouveaux tenants du prêt-à-porter hongrois avec une boutique de Nanushka, une hongroise très connue en France et dans toute l’Europe pour ainsi dire. Notons pourtant, qu’il y a encore des espaces à louer...
Contrairement à ce que son nom pourrait laisser penser, cette rue n’est pas très a la mode, la grande majorité des citadins ne la connaissent que peu en tant que telle. Ils ne l'aperçoivent qu’en passant ou la considèrent comme un court passage entre la sortie du métro et la place Vörösmarty, qu’ils fréquent par contre régulièrement surtout à Noël, quand de longues files d’attente se forment devant de petits chalets en bois offrant du vin chaud. La plupart des personnes interrogées ne peuvent pas lier ce nom à une rue, il faut leur expliquer, leur décrire. Certes, le niveau des prix n’est pas forcément compatible avec les revenus des salariés moyens ou même des CSP++ hongrois, tout comme c’est le cas pour les boutiques de l'avenue Andrássy. Par contre, les clients de l'hôtel sont rassurés, presque chez eux en voyant défiler ses magasins si familiers. C’est presque aussi tentant qu’à Paris ou Milan, et d’ailleurs, c’est bien le but espéré : vendre à ceux qui peuvent acheter, même si c’est parfois un peu plus cher que chez eux, mais c’est le charme des vacances...
Les lieux les plus connus du grand public sont le salon de coiffure, la tour aux cigares et le magasin Benetton qui viennent immédiatement à l’esprit du quidam lambda, tout comme l’hôtel Kempisnky bien évidemment. C’est là qu’avait dormi (devrait-on dire passé une nuit ?) en octobre 2007, l’ancien président américain Bill Clinton. Était-ce ce qui lui avait inspiré, lors de sa très courte visite, sa réflexion sur le fait que le plus grand problème au monde était les inégalités sociales, plus de la moitié de la planète ne bénéficiant pas du développement global ?
Il faut dire qu’à cette époque-là, la rue qui se trouve derrière l'hôtel ne s'appelait pas encore Fashion street.
La poussière a été balayée et quelque plaques métalliques ont été démaquillées, puis certains des vrais bijoux de la rue, ses immeubles d’architecture art nouveau sont redevenus visibles. Le projet de reconstruction a été lancé en 2007, mais la rue Deák Ferenc, dont la partie qui longe l'hôtel Kempinsky porte désormais le doux nom de Fashion Street figurait déjà en 1990 dans les plans de reconstruction de la cité.
18 tonnes de cuivre ont été utilisées pour le nouveau design.
Un vrai bijou.
Le mot bijou s’est d’ailleurs doucement infiltré dans le vocabulaire hongrois avec un sens quelque peu différent. Il désigne des bijoux fantaisie de peu de valeur esthétique et pas chers.
En 2010, un projet professionnel a été créé, appelé SFB Fashion Street Budapest, qui a pour but de créer des archives digitales rassemblant les vêtement portés dans les rue de Budapest considérés en tant que moyens d’expression et de création d’une identité individuelle qui permettrait d’appartenir ou de se distancier d’une certaine couche sociale.
C’est une rue aussi courte que le temps qu’il faut pour tomber amoureux d’une jupe en soie bleue, brillante comme un petit coffret de bijoux à deux pas du pont des Chaînes.
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