Faites ce que je dis, pas ce que je fais !
La nouvelle législation sur les média précise que le contenu des médias «ne doit pas inciter à la haine contre les personnes, les nations, les communautés, les minorités nationales, ethniques, linguistiques ou autres, ni contre une majorité, une église ou un groupe religieux».
Le parti au pouvoir fait fi toutefois de sa propre loi en lançant une campagne haineuse contre la grande philosophe hongroise Ágnes Heller, figure de proue de la dissidence, ainsi que contre quatre de ses confrères. Ces philosophes, réputés de gauche, sont soupçonnés d’avoir perçu un demi-milliard de forints (environ 1,8 million d’euros) lorsque la gauche était au pouvoir pour écrire des œuvres fumeuses ou inutiles. Ces intellectuels sont par ailleurs accusés «d’avoir sali» l’image de la Hongrie à l’étranger en critiquant la loi sur les médias. La majorité d’entre eux sont d’origine juive, et cette campagne joue sur les vieux poncifs de l’antisémitisme. Pour Agnes Heller, qui porte plainte pour diffamation, ces attaques ont un air de déjà-vu : «En 1973, le pouvoir avait lancé une campagne similaire contre moi : ils ont dit que je n’étais plus digne de faire de la recherche. Mon mari a été arrêté et nous avons été accusés de trafic de devises. Aujourd’hui, on m’accuse aussi de crimes économiques, sans aucun fondement. Leur "inquisiteur" peut chercher, il ne trouvera aucun abus financier. Tout ce qu’il trouvera, c’est de la pensée hérétique».
(Libération)