EXPO: BBS 50
Le Műcsarnok fête les 50 ans du Béla Balázs Stúdió à travers une vaste exposition, bien documentée quoique très exhaustive, grâce à laquelle on replonge avec plaisir dans ces années de création sans complexe dont le BBS a été l’un des moteurs les plus importants durant la deuxième moitié du XXe siècle. Le Béla Balázs Stúdió était en effet, jusque dans les années 1980 voire 1990, l’un des phénomènes les plus importants dans les milieux artistiques et intellectuels hongrois. Le BBS en chiffre c’est 271 réalisateurs, 50 ans, 511 films, des données qui ne laissent pourtant rien transparaître de la réelle importance de ce studio de production cinématographique et encore moins de l’ouverture d’esprit qui y était tolérée (du point de vue des autorités, qui préféraient censurer certains films plutôt que d’interdire leur production en amont), voire même de rigueur puisqu’elle permettait et encourageait toutes les audaces visuelles, toutes les recherches stylistiques et narratives autour du cinéma puis de la vidéo.
Pour fêter ce 50e anniversaire, le Műcsarnok a choisi de ne pas trop coller à la chronologie, quoique celle-ci soit tout de même respectée afin de mieux saisir l’évolution et la succession des différentes périodes créatrices. La formulation des différents espaces d'exposition, la sélection des films et la documentation qui leur est associée fait d’avantage la part belle à des notions de créativité, de communauté et d’affinité, et regroupe par ailleurs les artistes selon leurs sujets de prédilection ou encore de par la censure dont ils ont parfois été victimes. Il s'agit en somme d’une exposition à entrée multiple: le spectateur est libre d’étudier en détail les nombreuses archives (films bien sûr, mais aussi photos, coupures de presse, etc.) qui documentent l’époque de Kádár, de découvrir des films censurés pendant de nombreuses années pour avoir pris la liberté de critiquer trop ouvertement la bureaucratie, la guerre ou de montrer les dites déviances sociales de certains jeunes. Le visiteur peut aussi préférer s’attacher à l’analyse des tendances neo-avangardistes de plusieurs générations d’artistes hongrois prolifiques ou tout simplement de se laisser porter et séduire par les images…
On peut regretter que le très beau catalogue de l’exposition ne soit qu’en hongrois (!), difficile dans ce cas d’approfondir les premières impressions laissées par cette vaste et stimulante exposition. Heureusement, de nombreuses explications en anglais guideront votre parcours dans ce labyrinthe d’images parfois drôles (la course poursuite tantôt surréaliste tantôt digne de Buster Keaton du film de Mark Novak Mardi (1963)), parfois espiègle (la jolie jeune femme qui crève l’écran dans Toi (1962) d’István Szabó), parfois expérimentales (András Szirtes dressant le portrait de 6 jeunes peu conventionnels dans les années 1980 dans un film au titre mystérieux: L’histoire de la colonie Pronuma) et très souvent poétiques. Que certains films soient devenus cultes n’est pas une surprise – la chanteuse blonde platine du groupe Trabant à l’arrière d’une décapotable a explicitement la carrure d'une star – mais qu’une fois l’exposition décrochée vous ne les connaissiez toujours pas en serait une amère.
Frédérique Lemerre
BBS 50. Autres voix, autres pièces Tentative(s) de Reconstruction.
Jusqu’au 21 février
Műcsarnok
XIVe arrt. Hősök tere
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