Du rififi à Pécs

Du rififi à Pécs

L’Université des Sciences de Pécs (PTE) est secouée par une affaire de corruption qui remonte probablement à 2007. Plusieurs dirigeants de l’Université ont été arrêtés, mais aussi les responsables de trois entreprises informatiques qui auraient remporté illégalement de juteux marchés publics.

Fin mai, le Bureau d’enquête national (NNI) a arrêté dix personnes soupçonnées d’avoir collaboré afin de faire bénéficier certaines entreprises de marchés publics portants sur les équipements en informatique de l’Université. Le principal accusé est Gábor Imhof, qui était l’intendant de la PTE depuis 2007. Il est accusé d’avoir orchestré une organisation criminelle et d’avoir lui-même décidé de l’issue de certains marchés publics. L’affaire semble s’être avérée juteuse pour les trois sociétés suspectes mais aussi pour les membres de l’organisation qui auraient reçu des commissions de 5 à 10% de la valeur de chaque contrat. En effet, la PTE consacrait ces derniers temps en moyenne 700 millions de HUF par an à l’achat d’équipements informatiques. Or le montant précis des pots-de-vins n’est pas encore connu, puisque les membres de l’organisation les ont reçus en liquide dans des enveloppes et non pas via leurs comptes bancaires. Plusieurs caméras de surveillance ont d’ailleurs filmé ces échanges d’enveloppe, par exemple sur le parking d’un supermarché.

Dans un deuxième temps, début juillet, le NNI a arrêté dix autres personnes qui auraient fait partie de l’organisation, portant à 20 le nombre de membres présumés coupables de corruption. Cette fois, outre l’achat de produits informatiques, certaines livraisons de meubles ont également semblé suspectes aux yeux des enquêteurs du NNI. En 2007, peu après son arrivée,

Gábor Imhof a souhaité prendre en main la coordination des achats des meubles, qui relevait jusqu’alors de la responsabilité des dirigeants des différentes facultés de la PTE. Le NNI croit ainsi avoir trouvé un deuxième fil de cette affaire de corruption. Il s’est avéré en effet lors de leur enquête que certaines livraisons ont été payées deux à trois fois plus chères que le prix du marché. Plusieurs autres responsables de l’Université figurent parmi les accusés, comme le dirigeant informatique ou celui qui administrait les achats de la PTE. Sur les vingt accusés, neuf se trouvent actuellement en détention provisoire, tandis que les autres se défendent en liberté.

L’affaire commence d’ailleurs à toucher la sphère politique, le PDG de l’entreprise régionale qui décide des projets d’investissement bénéficiant de fonds européens ayant également été mis en détention. D’autre part, certaines sources croient savoir que Gábor Imhof était en contact avec plusieurs hommes politiques à Pécs et que ces détournements d’argent servaient à remercier les politiciens pour leur soutien. Quant aux entreprises informatiques qui avaient remporté des marchés publics, l’une d’entre elles était en partie dirigée jusqu’au mois de mai dernier par un homme d’affaires proche du Fidesz, actuellement membre de l’un des comités de travail du parti.

Si les enquêtes menées par le NNI prendront encore du temps, l’image de la faculté, pourtant un établissement de grande tradition, a déjà été sérieusement ternie. L’Université de Pécs a été fondée au XIVe siècle, devenant ainsi la première université de Hongrie. Elle a cessé son activité à cause de l’invasion des Turcs, mais s’est réorganisée au XVIIIe siècle. Avec plus de 30.000 étudiants, elle fait aujourd’hui partie des plus grandes universités de Hongrie. Son nouveau recteur a été nommé pour quatre ans en mars dernier. Il s’est fixé pour objectif d’augmenter la qualité de l’enseignement et le nombre des recherches menées à l’Université, de façon à ce que la PTE soit classée parmi les trois meilleures universités hongroises.

Anna Bajusz

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