Disque: Bori Péterfi and Love Band

Disque: Bori Péterfi and Love Band

Déjà le nom du groupe suggère la volonté de garder une nuance d’ambiguïté. Qui donnerait en 2007 le nom d’Amour à son groupe ?

Ce choix est d’autant plus étrange que ce Love Band est, en partie, formé des musiciens de Amorf Ördögök (Diables amorphes), groupe disparu il y a quelques années et ayant eu la même chanteuse phare sur scène et… pas mal de fans. Mais ce nom reflète peut-être mieux la thématique des chansons de ce disque, sorti il y a plus d’un an, qui raconte autant d’histoires de la vie quotidienne emballées dans des jeux de mots forcément intraduisibles. Alors pas de panique, ce n’est pas la peine de vous lancer dans une série interminable de cours de hongrois, ce ne sont pas les paroles qui comptent le plus, même si elles s’avèrent de temps en temps bien rigolotes. La musique aussi rend fidèlement tout ce qui est dit avec un léger défaut de prononciation (et qu’il nous soit permis de faire ici une petite remarque ironique : ce charmant défaut présage en même temps à cette chanteuse une longue carrière musicale puisque depuis les années 80’, en Hongrie, pratiquement tous les groupes cotés, en particulier à l’époque, sont dotés d’un leader zézayant ou blésant). Les paroles, tout comme les mélodies, se jouent la main légère, reprenant des lieux communs de la musique pop, en y mêlant des timbres de hard rock, de punk ou de reggae, et chatouillent le plat du pied. Les arrangements sont bien riches en instruments et en effets, ils mélangent beaucoup de styles et de coloris que la voix de la chanteuse-actrice, de temps en temps tremblante et incertaine sans être toutefois hésitante, complète et guide dans un tourment toujours convaincant. La force et l’énergie de cette musique invitant à danser se situent sans doute dans les bases rythmiques qui dominent discrètement les onze chansons.

Mais pour que personne ne se sente privé du contenu, voici un petit échantillon de ce qui caractérise les multiples facettes de la “femme actuelle”, qui constituent la trame de ce disque. Avant de connaître la vie et le mystère d’un vampire féminin, l’élan est donné par un refrain qui sent déjà le tube : « plonge-toi dans mes cheveux et fredonnes-y “labamba” ». Le voyage continue dans les vapeurs de l’opium et la projection sonore d’un film intérieur, puis, à travers des harmonies au synthétiseur des années 80’, nous assistons à une scène de séduction par une blonde, sur les bords du Danube au clair de lune (Hello, modern design). Le titre de la chanson suivante révèle tout de suite ses secrets, il s’agit de la Fille froide, en mal d’amour. Les clapotis d’après viennent de la chasse d’eau, bruits de fond d’une scène de ménage, et sont suivis de deux véritables chansons d’atmosphère. Vient ensuite l’énumération des avantages et des méfaits de l’argent, accompagnée d’une musique suffisamment grave pour ce sujet. Et, finalement, après avoir parcouru les multiples visages de l’amour, nous effectuons un catapultage de cette balançoire construite de ritournelles.

Bori Péterfy n’est ni chanteuse, ni actrice, mais les deux en même temps. Ses deux carrières se sont construites plus ou moins en marge des voies officielles : avant de devenir membre du Théâtre National en 2008, elle a fait partie de troupes théâtrales indépendantes, activité parallèlement à laquelle elle n’a jamais négligé la musique. Résultat : Bori Péterfy, malgré son relativement jeune âge, a déjà une page consacrée à elle seule sur Wikipedia !

Sophie Lemeunier

 

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