Copacabana
Rencontre avec le réalisateur Marc Fitoussi
Le titre évoque des souvenirs nostalgiques, le goût de la musique brésilienne de l’héroïne. C’était une première des Journées du Film Francophone à Budapest, en présence de son réalisateur, que nous avons rencontré.
JFB : C’est un film qui nous surprend et nous saisit ; c’est le monde à l’envers : une mère , jouée par Isabelle Huppert, dotée d'un véritable esprit d’aventure et sa fille (également dans la vie), une vraie petite bourgeoise.
Marc Fitoussi : Les rôles sont inversés en effet : la mère est une immature qui ne se soucie pas de la réussite sociale et la fille est peut-être trop sage. J’aime beaucoup ce personnage que joue Isabelle Huppert mais je ne voulais pas non plus condamner le personnage que joue la fille. Ce n’est peut être pas facile d’avoir une mère toujours excentrique, fantaisiste qui ne prend jamais de responsabilités. Mais à la fin, elles assument ce qu’elles sont, sans ressentir le besoin de changer. La fille a choisi de se marier et on les voit danser ensemble, la fille dans sa robe blanche solennelle et la maman avec ses plumes. Chacune a fait ses propres choix mais elles se sont finalement acceptées.
JFB : On voit une femme de la génération « mai 68 » et là on se souvient d’Isabelle Huppert jouant, à une autre époque, dans le film de Bertrand Blier, les valseuses.
M.F. : C’est vrai que l’héroïne semble être issue de cette génération là, mais je ne crois pas qu’elle soit engagée, ni politisée. Elle est restée comme elle devait l'être quand elle était sur les barricades. C’est la même folie douce. Elle est très adolescente. Dans le film, elle a envie de partir au Brésil, plus par hédonisme et envie de faire la fête. Je pense que les gens qui vieillisse recherchent la stabilité à un moment ou un autre. Ce qui est intéressant et peut être surprenant, c’est que l'embourgeoisement est un choix que fait sa fille très jeune.
Dans le film, Les Valseuses, Isabelle Huppert avait joué une petite scène – c’était un de ses premiers rôles. Dans cette scène, elle fugue de chez ses parents. Je trouvais drôle d’imaginer que ce même personnage puisse réapparaître plusieurs années après : elle a fait le tour du monde, elle a eu un enfant et reprend la maison héritée de ses parents.
JFB : Comment avez vous réussi à faire jouer Isabelle Huppert avec sa fille, Lolita Chammah, et présenter le film au dernier Festival de Cannes ?
M.F. : C’était un cadeau inespéré. C’est très utile et agréable d’être sélectionné à Cannes. C’était dans le cadre de la Semaine de la critique où le film se retrouve forcément sous les projecteurs et, dès le mois de mai, on a entendu parler du film qui a bien marché dans les salles. Si j’ai fait ce film, c’est d’abord en pensant à Lolita Chammah qui avait joué dans mon premier long métrage. Et puis je me disais que ce serait merveilleux que la mère soit Isabelle Huppert, car c’est la meilleure actrice qui soit de cette génération. Dans ses derniers films, elle n'apparaissait que dans un registre très sombre comme dans « la Pianiste ». Et puis, la mère et la fille avaient très envie de jouer toutes les deux ensemble.
Éva Vámos