Comment construire une métropole durable?

Comment construire une métropole durable?

Le Grand Pari(s)

 

Faire de Paris un modèle de métropole durable avec des transports plus efficaces et plus agréables, avec une économie plus compétitive, une meilleure qualité de vie, un rayonnement culturel plus fort, une présence accrue de la nature dans la ville... c'est le défi qu'a lancé Nicolas Sarkozy en septembre 2007 à travers une consultation internationale. Après Oslo, Berlin, Moscou, l'exposition «Grand Pari(s)» a été présentée à la FUGA (Centre d'architecture de Budapest), et trois conférences liées à cet événement se sont déroulées à l’Institut français de Budapest, du 24 mars au 18 avril 2011.

 

Le Ministère de l'intérieur hongrois, en coopération avec l'Institut français, l’Ambassade de France et le Centre d’architecture de Budapest, s'est intéressé à ce projet d'aménagement global du Grand Paris, exemple d'expérimentation d'une grande métropole et a souhaité recevoir cette exposition du « Grand Pari(s) » à Budapest.

Organisation de la consultation

Jean Gautier, Conseiller-maître à la Cours des comptes, ancien Directeur de l’Architecture, adjoint au directeur de l’architecture et du patrimoine au Ministère de la culture et de la communication, a présenté le 25 mars l'organisation de cette consultation : Parmi les 50 équipes d’architectes/urbanistes qui avaient été pré-sélectionnés, dix ont donc été retenus, avec des profils très différents, certains déjà très connus comme Jean Nouvel. Les équipes ont eu un délai de 9 mois pour préparer leur projet. Les architectes retenus se sont entourés d'équipes pluridisciplinaires (géographes, économistes, sociologues, philosophes, paysagistes…) afin de prendre en compte toutes les dimensions de l'aménagement d'une grande métropole. Chaque équipe devait travailler avec des étudiants. L’équipe Rogers Stirk Harbour & Partners a ainsi coopéré avec la London school of economics.

Les dix équipes – sélectionnées dans le cadre de la consultation «le Grand Pari(s) de l'agglomération parisienne» – ont travaillé sur deux axes de recherche : la métropole du 21ème siècle de l'après-Kyoto et le diagnostic prospectif de l'agglomération parisienne.

Elles ont dû apporter des solutions concrètes, précises et globales, pour améliorer la vie quotidienne de tous les Parisiens. Il s'agit de mettre en avant une nouvelle pensée de la ville du 21ème siècle, de remédier aux graves difficultés relevées en matière de transport et d’accessibilité, de qualité de l’environnement, d’accès au logement et à l’emploi.

Les conclusions se sont rejointes : nécessité de densifier Paris, prise en compte de l'eau, réflexion sur la mobilité, création de pôles d'attractivité, ...

La région parisienne, qui représente un peu plus du sixième de la population nationale (11 millions d'habitants), 1281 communes, et près du tiers du produit intérieur brut, ne peut se contenter de son rôle national dans un contexte de mondialisation, et se doit de consolider sa place de centre attractif pour toute l’Europe.

Francis Rambert, directeur de la Cité de l’Architecture et du Patrimoine, a introduit le 12 avril cette stratégie d'aménagement et ce nouveau défi de Paris Métropole.

Un des projets à la loupe

L'Institut français de Budapest a permis aux férus d'urbanisme de rencontrer une des équipes retenues à cette consultation internationale : François Decoster, architecte, a présenté le 5 avril dernier le travail de son équipe l'AUC (de Djamel Klouche). Cette dernière a travaillé sur le concept du «Grand Paris stimulé». Pour François Decoster, il s'agit d'un travail atypique qui questionne les méthodes de travail à grande échelle. L'AUC a pensé son projet à travers plusieurs étapes : tout d'abord, la définition d'une matrice qui s'inspire de l'observation des grandes villes du monde et fournit les exemples les plus réussis des grandes métropoles. De là, 14 thèmes de travail ont été retenus mettant l'accent sur une métropole hybride. Des situations ont ensuite été imaginées, scénarios qui ont pour objectifs de représenter la ville par morceaux, dans toute son hétérogénéité. Cette mise en perspective a conduit l'AUC vers une réflexion sur le recyclage de l'existant, sur la diffusion de la ville dans des espaces tenus en marge comme les quartiers des grands ensembles. C'est pourquoi le projet de cette équipe porte aussi bien sur le cœur d'agglomération que dans les territoires d'habitat pavillonnaire de la périphérie : création d'un centre de recherche à Saint-Denis, idée d'un «très, très grand Louvre», sorte de «collecteur métropolitain» avec une gare, un espace culturel ouvert, recherches de nouveaux îlots (clusters hybrides) pour créer des nouveaux pôles d'attractions sociaux et économiques, … Et une exigence : innover sur la question structurante des transports, en généralisant l’utilisation de la voiture électrique. En résumé, pour l’équipe de Djamel Klouche, «la métropole parisienne est déjà là, c’est une métropole héritée, mais elle n’est pas identifiée».

L'avenir du Grand Pari(s)

La région capitale a trop longtemps souffert d'une politique au fil de l'eau. A la logique du morcellement administratif, il fallait substituer une vision pour la métropole. Tel était l'enjeu présenté par Nicolas Sarkozy. Une loi portant sur l'avenir de la région a donc été adoptée par le Parlement et la Société du Grand Paris mise en place.

Mais la vie politique n'est pas un long fleuve tranquille et ces grands objectifs louables peuvent parfois en pâtir. Christian Blanc, Secrétaire d'Etat au Grand Paris, a dû démissionner de ses fonctions en juillet 2010 suite à une consommation excessive de cigares (dont le coût également excessif était payé par le ministère) !

Par ailleurs, le débat qui a retenu le plus l'attention des élus d'Ile-de-France ces derniers mois concerne prioritairement les transports publics : deux débats publics se sont tenus en parallèle, sur deux projets de métro concurrents. L’un, le métro Grand Paris, dit aussi «Double Boucle» ou «Grand Huit», défendu par le gouvernement. L’autre, Arc Express, par la région. Fin janvier, le président du conseil régional et du Stif, Jean-Paul Huchon, et le ministre chargé du Grand Paris, Maurice Leroy, ont annoncé la conclusion d'un accord prévoyant 32,4 milliards d'euros d'investissements d'ici à 2025.

Un aspect positif : pour cette question des transports, les propositions des architectes du « Grand Pari(s) », mélange de remise à niveau et de créations de lignes privilégiant le passage en aérien dès que possible, servent de base aux discussions. C'était là aussi l'objectif de cette consultation : impliquer ces équipes d'urbanistes dans les projets futurs de la région parisienne.

D'autres propositions de ces équipes devraient se concrétiser et sortir de terre, qu’il s’agisse de créations architecturales ou de commandes publiques comme la nouvelle cité judiciaire aux Batignolles, dans le 17e arrondissement de Paris. Ce grand Pari(s) reste donc à accomplir !

Gwenaëlle Thomas

 

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