Big Brother– Episode 2

Big Brother– Episode 2

La vaste réforme des média entreprise par le gouvernement inquiète au plus haut point les médias hongrois, tout en soulevant l'indignation à l'échelle internationale. Retour sur une réforme ô combien politique, et dangereuse.

Des premières pages blanches, des documentaires et des tables rondes sur l’avenir du contrepouvoir des médias en Hongrie, la presse et les médias hongrois affichent leur émotion face à la nouvelle étape de la réforme des médias: l’adoption de la loi sur la «liberté de la presse et les normes de base des contenus médiatiques», qui centralise les services d’information et les médias publics, comme MTV, DunaTV et la Radio Hongroise (MR). Outre les chaînes publiques, la nouvelle législation porte sur l'ensemble des médias hongrois, de la presse écrite aux portails Internet et prévoit l’introduction d'amendes pour tout abus de communication de «fonds équilibrés», comme le stipule le texte adopté. Un nouveau système, qui n’est absolument ni moins cher, ni plus efficace que le précédent, mais qui permet une surveillance politique en continu des informations et nouvelles diffusées, comme le souligne certains commentateurs, qui voient là la mise en place d’un système de propagande orange.

Résumé de l’épisode précédent...

La loi votée fait partie du «paquet-médias» (évoqué en août par le JFB), composé de 5 propositions, dont 3 ont été adoptés l'été dernier: la réforme de la constitution, la restructuration du fonctionnement des médias publics et des organes de surveillance et la création de la MNHH (l’Autorité Nationale de Télécommunication et des Médias), chargée du contrôle exclusif de surveillance des médias hongrois. La dernière partie, actuellement en révision, à savoir la loi sur la «liberté de la presse et des normes de base des contenus médiatiques», vise à établir des règles étiques universelles sur le journalisme, afin de créer un milieu transparent et contrôlé, accordant ainsi les mêmes droits et obligations à tous les journalistes hongrois. Il faut noter que cette loi, en vigueur à partir de 2011, exige l’enregistrement administratif des organes de presse auprès de l’autorité centrale des médias, condition ferme de la licence de publication, pesant même sur les médias électroniques et sites informatifs. C’est de cet enregistrement, qui, en tant que condition de fonctionnement, est finalement un outil implicite de censure politique, que la sanction la plus lourde de la MNHH peut priver les organes de presse abusant de la loi. Le budget de la MNHH, s’élevant à 29,3 Milliards de HUF, prévoit ainsi de comptabiliser 150 millions de HUF d’amendes en 2011.Un montant si élevé que le marché des journaux à caractère politique risquerait d’être mis en péril et qui pourrait causer leur possible insolvabilité. 

Vers une information centralisée

Le paquet-médias, vivement critiqué par plusieurs organisations professionnelles, comme l’EBESZ (Organisation des Journalistes Européens), l’IPI (International Press Institute) ou le SEEMO (South East Europe Media Organisation), vise la révision complète des services d’informations et de communication de masse, même si la communication en question ne s'adresse en fait pas directement aux «masses» concernées, aucun débat public n’étant eu lieu sur la question. A partir du 1er janvier 2011, le fonctionnement des médias publics, comme celui de MTV, de Duna TV et de la radio nationale MR, dont les effectifs s’élèvent au total à 3000 personnes, sera centralisé et chacune emploiera désormais 50 collaborateurs qui ne seront chargés que du marketing et de la programmation des médias, celle-ci étant alimentée par des nouvelles du Bureau Central d’Informations (MTI), qui aura ainsi le droit exclusif de fournir des informations aux organes publics. Les services de MTI, désormais payants, seront par la suite gratuitement diffusées et accessibles à la presse commerciale, élément crucial pour pouvoir diffuser des informations décisives auprès des médias privés et ainsi, comme le souligne les opposants à cette réforme, renforcer le monopole des informations d'État... Les autres programmes, non informatifs, seront produits par un organisme central des services de presse, une sorte d'usine de production médiatique, disposant d’un budget confortable suite à l’incorporation des fonds des médias publiques. 

Liberté de la presse menacée

La nouvelle loi est vivement critiquée par l’opposition qui projette d'élaborer des propositions alternatives, qui ont toutefois bien peu de chance d'être retenues. D’autres, hommes politiques et intellectuels, ont affiché leur mécontentement vis à vis du texte et attirent l’attention sur le fait qu’il n’est toujours pas conforme à la constitution. La réforme des médias hongrois alimente le débat désormais au niveau international. The Washington Post dédie un article aux dangers de ces mesures, allant à l’encontre de la démocratie parlementaire. Certains journaux hongrois, comme Magyar Narancs et Élet és Irodalom, ont quant à eux protesté contre ces mesures en affichant à la Une... une page blanche.

Kata Bors

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