Arrêt du soutien aux fonds de pension

Arrêt du soutien aux fonds de pension

Le gouvernement a décidé de suspendre tout financement public des fonds de pension à compter du 1er novembre prochain et jusqu'à la fin 2011. L'arrêt du soutien aux fonds de pension est censé faire économiser à l'État environ 60 milliards de HUF en 2010 (près de 220 millions d'euros). L’occasion de faire le point sur le système des retraites en Hongrie.

La suspension du financement public des fonds de pensions à compter du 1er novembre prochain et jusqu'à la fin 2011 a été décidée par le gouvernement afin de participer à l'objectif de ramener le déficit budgétaire à 3,8% cette année et à 3% l’an prochain. Selon le ministre des Finances, l’arrêt du soutien aux fonds de pension se justifie par la mauvaise conjoncture qui oblige à mettre en œuvre une politique économique se focalisant sur «un "triangle du succès" dessiné par la croissance économique, la création d'emplois et la stabilité fiscale».

Depuis le 1er janvier 1998, le système des retraites en Hongrie peut être schématisé par trois piliers. Le premier pilier est celui du système de retraites par répartition, c’est-à-dire un système dans lequel ce sont les cotisations actuelles qui paient les retraites, les actifs payent la pension des retraités dans un souci de solidarité nationale et intergénérationnelle. Ce système de financement était le seul avant 1998. Son déficit a conduit Gyula Horn, Premier ministre de 1994 à 1998, à repenser le financement des retraites en ajoutant au financement par les cotisations actuelles deux autres sources de financement. Le gouvernement a alors fait appel au mécanisme des fonds de pension qui constituent le deuxième pilier. Pour ne pas accorder une part trop importante à ce mécanisme au rendement très variable car dépendant des forces du marché, il a été décidé que seuls les salariés âgés de 28 à 35 ans devraient obligatoirement verser 8% de leur salaire à ces caisses. Quant aux autres, le choix leur a été laissé d’investir ou non dans un fonds de pension en plus du financement de leur retraites par les cotisants. Par ailleurs, et ceci constitue le troisième pilier, le salarié peut choisir d’accumuler un capital suplémentaire plafonné à 5000 HUF par des cotisations complémentaires de manière tout à fait volontaire. Ce pilier est nommé assurance volontaire de retraite complémentaire. Il faut cependant noter que les fonds de pension hongrois ne sont pas des fonds de pension classiques car ils ressemblent plus à des associations d’épargne mutualiste, leurs membres ne sont pas clients mais copropriétaires de part non-vendables. En 2009, le gouvernement d’alors avait tenté de transformer ces fonds de pension en entreprises mais s’est heurté à l’opposition de l’opinion publique, du Président de la République et de la Cour constitutionnelle qui jugeaient inacceptable l’idée que les membres des fonds de pension puissent perdre leurs titres de propriété non-vendables. Des droits ne peuvent être restreints sans compensation.

Dans le cadre de sa politique de baisse des dépenses publiques, le gouvernement a annoncé la semaine dernière qu’il supprimerait temporairement tout financement public aux fonds de pension. Il faut reconnaître que le gouvernement fait un constat juste en avançant le fait que, en grande partie pour des raisons liées à la crise financière, les retraités aurait d'avantage gagné si leurs retraites avait été financées uniquement par répartition. Il pointe donc un problème très important qui est celui de l’aspect aléatoire de la retraite par capitalisation en ce qui concerne le montant des pensions, évoluant en fonction de la conjoncture économique. Après avoir atténué le caractère obligatoire de la retraite par capitalisation entre 1998 et 2002, le Fidesz s’attaque désormais au financement public de celle-ci. Temporairement. Et c’est là que se situe toute la contradiction. L’arrêt provisoire du soutien aux fonds de pension est vendu comme étant le moyen de défendre un régime de retraites par répartition. M. Orban proclame que la retraite par capitalisation est un piège pour les futurs retraités, il a sans doute raison. Dans ce cas, pourquoi sa mesure est-elle provisoire? Comme pour l’impôt provisoire sur les institutions financières, l’objectif est purement comptable. Des sommes doivent être trouvées pour satisfaire les exigences de l’UE et du FMI. Puisque cette mesure ne sera plus en application dans moins de deux ans, on ne peut espérer que les actifs se tournent massivement et exclusivement vers une retraite par répartition. Structurellement le système de retraites restera inchangé. Le Fidesz est entièrement muet sur l’avenir du système des retraites. Si, comme il le dit, il veut se soucier du salarié en étant le défenseur de la retraite par répartition et être l’ennemi de la retraite par capitalisation, il devra changer le système des trois piliers et rendre possible un régime de retraite exclusivement par réparation. Dans la situation actuelle, c’est impensable sans augmenter l’âge légal de départ ou la durée de cotisation, c’est-à-dire impossible sans porter atteinte aux salariés. Ou alors, le Fidesz décide de déplacer le curseur du partage de la richesse en baissant considérablement la part des dividendes dans la valeur ajoutée. Stoppons cette fiction.

Yann Caspar

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