10e Forum de la danse
Rencontre avec Jolán Török
C’est au cœur du Vár, dans le très joli Théâtre National de la Danse, que Jolán Török, sa directrice depuis son ouverture en 2001, a bien voulu nous parler du Forum de la danse qui fête ses dix ans cette année. Un programme riche à ne pas manquer entre les 17 et 29 avril prochains, aussi bien au Théâtre National de la Danse, qu’au Palais des Arts.
JFB: Quel a été l’élément déclencheur de la création du festival de danse de Budapest?
Jolán Török: Le festival, qui a pour nom Forum de la danse, est né il y a dix ans de la combinaison de trois festivals créés dans les années 1980 en Hongrie: l’inter-ballet, l’inter-folk et le festival hongrois de la danse. L’idée nous est venue de célébrer la Journée Internationale de la Danse, qui se tient le 29 avril, en organisant ce festival. Mais rappelons qu’à l’époque où j’étais danseuse professionnelle, le principal souci pour nous – danseurs et chorégraphes – était de trouver un lieu où danser. Des années 1950 à l’ouverture du Théâtre National de la Danse, l’art de la danse n’avait pas de lieu. J’ai été danseuse dans la compagnie Ensemble de danse de Budapest (Budapest Táncegyüttes) dont le directeur était István Molnár. Il avait développé sa propre technique en alliant danses classique et folklorique. Deux maîtres de ballet issus de l’Académie de danse et danseurs à l’Opéra, József Forgách et László Perlusz, nous faisaient travailler la danse classique. Endre Jeszenszky, maître de danse contemporaine, ainsi que des professeurs invités du monde entier se chargeaient de la formation contemporaine. Il fallait louer des salles de théâtre par exemple au Thália, à l’Opérette ou au Petôfi Csarnok, pour pouvoir nous produire régulièrement. Dans les années 1980, nous avons organisé le Forum de la danse sous la direction de Tibor Galambos. Il aura fallu du temps, mais c’est de cette manière que nous sommes parvenus à convaincre le gouvernement de la nécessité de donner à la danse hongroise son théâtre. Ainsi le Théâtre National de la Danse a-t-il succédé au Forum de la danse et c’est en hommage à ces 20 longues années de travail et de succès de cette organisation que nous avons conservé son nom, Forum de la danse pour le festival actuel.
JFB: Quelles sont les spécificités du Forum de la danse aujourd’hui?
J.T.: Ce festival est l’occasion pour les compagnies de danse hongroises de présenter leurs nouvelles productions. On peut d’ailleurs dire que, ces dernières années, de plus en plus de productions de danse en Hongrie ont spécialement été conçues pour ce festival. La plupart des spectacles qui seront présentés seront des premières. De plus, la diversité des spectacles est importante: on peut assister à un ballet classique, découvrir des chorégraphies contemporaines ou encore des danses folkloriques hongroises, dans le cadre du même événement. Et puis, comme chaque année, nous invitons une compagnie étrangère qui n’a jamais dansé à Budapest. Cette année nous recevons Les Ballets Trockadero de Monte Carlo qui nous viennent des Etats-Unis.
JFB: Les spectacles proposés s’adressent à un très large public.
J.T: En effet, je ne connais pas d’autres institutions dans le monde qui propose un si large éventail de spectacles et pour tous les âges. Pour les plus jeunes, la Compagnie Yvette Bozsik et la Compagnie de l’Art du mouvement hongrois présentent respectivement en première Pierre et le loup, et Carotte, Radis, Noisette. Pour les autres générations, le répertoire est très varié: il y aura de jeunes créateurs comme Éva Duda, Zoltán Grecsó, et Zoltán Fodor, et bien d’autres compagnies de Budapest, Szeged, Győr…
JFB: Quel bilan dressez-vous de ces 10 années?
J.T.: Je pense que ce festival connaît un grand succès auprès du public comme des chorégraphes et des danseurs. Il “inspire” et motive les artistes. Le fait de recevoir des compagnies étrangères est une formidable ouverture sur ce qui se fait dans le monde. Quand la légendaire compagnie de Merce Cunningham a présenté son travail à Budapest, non seulement le public était enthousiaste, mais les professionnels de la danse ont pu avoir une approche directe de sa technique et de son travail. C’était formidable. Il faut aussi dire que 30% public est étranger.
JFB: La danse est très vivante en Hongrie.
J.T.: Oui. Nous essayons par exemple de rendre la danse contemporaine plus populaire avec le programme d’enseignement artistique beavató à l’attention de l’école secondaire. Il s’agit de présenter des spectacles de danse contemporaine aux lycéens en les préparant à ce qu’ils vont voir. Avant chaque représentation, une collègue dramaturge leur explique de quoi il retournera et, après le spectacle, il y a une discussion entre les élèves et les chorégraphes eux-mêmes. C’est une façon de sensibiliser les jeunes à la danse.
Milena Le Comte Popovic
Détail du programme:
Théâtre national de la danse,
1014 Budapest, Színház utca 1-3
www.dancetheatre.hu ou www.nemzetitancszinhaz.hu
Palais des Arts, 1095 Budapest, Komor Marcell u.1