« Divas »
Les figures de proue du monde arabe
Les femmes sont mises à l’honneur par l’Institut du Monde arabe dans son exposition sur les « Divas ». Des femmes belles, fortes, émancipées, visionnaires, adulées dans tout le monde arabe. Ces avant-gardistes ont créé les premiers mouvements féministes au Caire et étendront leur influence des années 1920 aux années 1970. À travers des portraits, des films, des bandes-son, des tenues somptueuses, l’exposition révèle ces divas, dans toute leur splendeur…
Les figures de l’émancipation féminine et des grands combats n’ont pas toujours été les plus promues dans l’histoire, histoire écrite bien souvent par des hommes. Les combats des femmes ont en effet souvent été relégués au second plan, voire complétement enfouis et oubliés.
De ma plus jeune enfance, je garde pourtant le souvenir d’artistes, icônes féministes, telles que Joan Baez et sa chanson « Here’s to you » que j’écoutais en boucle sur le tourne disque de ma tante, mais aussi en France, plus près, il y avait Anne Sylvestre.
Et d’autres femmes ont été pour moi des modèles inspirants, m’aidant à forger mes propres opinions : écrivaines, politiques, actrices, chanteuses, militantes de la première heure, femmes occidentales et femmes africaines, comme la chanteuse Miriam Makeba. Des femmes de courage, précurseurs, figures de proue des grands combats pour la liberté.
Mais j’avoue que je connaissais peu ou mal le rôle joué par les femmes, intellectuelles, artistes orientales dans les évolutions du monde arabe au siècle dernier.
Dès le départ, les visages gracieux des divas apparaissent en filigrane sur un rideau, qui s’ouvre sur une série de portraits. Le voyage commence… On découvre Le Caire au début du XXème siècle, à son apogée, ville cosmopolite. Des femmes issues de la bourgeoisie insufflent un vent de modernité. Il s’agit d’Hoda Chaaraoui, Ceza Nabaraoui, Safia Zaghoul. Engagées contre l’impérialisme, elles créent des cabarets, font émerger le cinéma égyptien, fondent des journaux, tiennent des salons, prônant le rôle central de la femme dans les transformations sociétales, artistiques, politiques, défendant son émancipation. On rentre d’ailleurs dans le salon de May Ziadé, femme influente, qui recevait intellectuels et politiques afin de débattre.
Cette période d’effervescence artistique et politique se prolonge avec l’avènement de l’industrie musicale pendant l’entre-deux-guerres. Vont naître les stars de la chanson, vénérées, portées aux nues, dont la voix sera relayée par les radios et le cinéma. On rentre dans plusieurs loges où la vie d’Oum Karthoum, Asmahan, Warda et Fayrouz se déroule à travers des photos, des tenues de scène lumineuses, des parures éclatantes, la diffusion des morceaux les plus connus de leur répertoire musical. Leurs chansons expriment leur fierté d’être arabe, la liberté, l’amour…
L’exposition se termine par une excursion dans l’univers du cinéma égyptien des années 1940-1950. Affiches, couvertures de magazines, extraits de films, costumes, mettent en scène Samia Gamal, Souad Hosni, Sabah, jeunes femmes de conditions modestes, resplendissantes, danseuses expressives, devenues des icônes du cinéma et des vedettes intemporelles. Cette série se termine sur Dalida, qui fait le lien entre le monde arabe et la France. Avant de devenir la célèbre chanteuse qui a rendu populaire dans l’hexagone, mais aussi en Europe, la chanson orientale « Salma Ya Salama », elle débute une carrière d’actrice en Egypte.
Avant de sortir, un court-métrage nous offre une vision hypnotique de Salma Hayek en danseuse orientale.
On sort ébloui de cette galerie de portraits féminins, mais surtout on retient le rôle fondamental qu’ont joué ces divas, d’origines égyptienne, libanaise, algérienne, syrienne, faisant émerger au Caire, en éclaireuses, un mouvement féministe, qui va irradier le monde arabe, participant activement à la défense des luttes d’indépendance. En changeant les mentalités, elles ont laissé un héritage fort en orient, et au-delà…
Exposition « Divas, d’Oum Kathoum à Dalida », Institut du monde arabe – Paris – jusqu’au 26 septembre 2021
https://www.imarabe.org/en/expositions/divas-arabes
Gwenaëlle Thomas
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