La Hongrie, encore loin de l’égalité
La Hongrie (19ème rang) se porte mieux que la plupart de ses pays frontaliers en termes de discriminations envers les personnes LGBTQ+, peut-on apprendre dans le dernier classement des pays européens par «Rainbow Europe». Cependant, des déclarations comme celle du président de l’Assemblée hongroise László Kövér, qui comparait le comportement d’un couple homosexuel voulant adopter un enfant à celui d’un pédophile, servent de rappel que le pays est encore loin de l’objectif visé.
Devant la Roumanie (37), l’Ukraine (36), la Serbie (30), la Slovaquie (26), et finalement la Slovénie (20), la Hongrie est surclassée dans ce palmarès de deux pays qui lui sont limitrophes : la Croatie (16) et l’Autriche (13). D’après Tamás Dombos de l’Alliance hongroise LGBT, une organisation nationale qui a pour mission de promouvoir l’égalité, les droits et la bonne perception des personnes LGBTQ+, il y a deux aspects de la loi hongroise qui sont particulièrement discriminatoires envers cette communauté : «la parentalité pour les couples du même sexe et la reconnaissance légale du sexe pour les personnes trans». Bien que le partenariat civil pour les couples homosexuels, reconnu par la loi depuis 2009, permet à ces derniers d’accéder à presque tous les mêmes droits qu’un couple hétérosexuel, le mariage leur est, encore aujourd’hui, strictement interdit par la constitution hongroise. Il en va de même pour l’homoparentalité.
«Malheureusement, même si l’homosexualité est dépénalisée au pays depuis 1962, plusieurs Hongrois pensent encore que cette orientation sexuelle est une déviance. Ils ne se sentent pas à l’aise en compagnie des personnes LGBTQ+, au travail comme dans la vie de tous les jours», poursuit Tamás Dombos. La situation politique actuelle, qui impose un climat patriarcal et hétéronormatif à la société, y est probablement pour beaucoup. Effectivement, en mai dernier, le président de l’Assemblée hongroise, László Kövér, déclarait qu’un homosexuel «normal» devait s’adapter au monde plutôt que de se considérer comme égal aux autres. Pourtant, le Code criminel de Hongrie sanctionne explicitement les discours haineux, homophobes comme transphobes. Il ne faut donc pas se surprendre que les personnes LGBTQ+ déclarent de moins en moins les crimes haineux à leur endroit, de peur de n’être pas prises au sérieux des autorités. «Plusieurs ont quitté ou considèrent quitter le pays», résume Tamás Dombos.
Le bon côté des choses
Des organisations non gouvernementales et fondations font en sorte que la situation s’améliore pour la minorité opprimée. C’est le cas de WeAreOpen qui promeut la diversité et l’inclusion au travail. L’organisation créée il y a 6 ans coopère aujourd’hui avec plus de 1000 compagnies hongroises. «Construire une culture d’entreprise diversifiée et inclusive est non seulement la bonne chose à faire, mais il y a également un sens commercial», affirme la PDG de l’entreprise, Melinda Miklós. «Si une entreprise peut créer une culture interne ouverte qui correspond à la réalité, elle pourrait être plus créative, innovante, pourrait mieux comprendre son marché et donc atteindre un meilleur résultat financier», poursuit-elle.
Somme toute, la situation hongroise ne peut s’améliorer qu’à pas de tortue. La vague conservatrice qui enveloppe présentement l’Europe centrale freine toute progression majeure. «Le gouvernement de Viktor Orbán, sans réduire les droits des personnes LGBTQ+, s’est assuré qu’il n’y ait aucun gain possible pour la communauté dans un futur proche», se désole Tamás Dombos. Tout ce qu’on peut espérer, affirme-t-il, c’est que les gens continuent à sortir du placard pour changer les mentalités.
Xavier Bourassa
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