The Beginning of a solution / A megoldás kezdete
Les œuvres de l’artiste hongrois Mulasics László s’exposent à la Várfok Gallery
C’est en allant du côté de Buda, au 11 de la rue Várfok, que la galerie du même nom donne la possibilité aux Budapestois et autres curieux d’assister à de nombreuses expositions d’artistes depuis 1990. Au lendemain du lancement de la rétrospective posthume autour des œuvres de l’artiste Mulasics László, proposant de nombreuses pièces inédites, nous sommes allés à la rencontre de Vanda Dilmann, historienne de l’art. Celle-ci travaille à la galerie Várfok, fondée par Károly Szalóky, figure emblématique de la scène artistique Hongroise, en coopération avec un petit groupe de passionnés. Elle nous fera, au cours de cette discussion, partager l’univers de Mulasics László et de cette exposition, se tenant du 2 février au 11 mars 2017.
« The beginning of a solution » : l’exposition Mulasics Lászlo à l’honneur à la Várfok gallery
Le titre de cette exposition est celui d’une œuvre inédite, composée de six parties et retrouvée dans l’atelier de Mulasics après sa mort. Elle en dit long sur les relations entre la galerie et l’entourage de Mulasics, puisque sa femme a donné l’autorisation aux organisateurs de se rendre dans l’atelier de l’artiste afin de choisir les œuvres à exposer. Cette trouvaille est importante dans un contexte où il semblait difficile de présenter des œuvres encore inconnues du public, pour un artiste dont les grandes peintures ont été exposées dans les précédentes collections. The beginning of a solution est donc devenue l’idée centrale de cette exposition et de son caractère inédit.
Cette rétrospective rend hommage aux techniques utilisées par l’artiste, principalement celle de l’encaustique, inspirée de l’art de la momification durant l’Egypte ancienne : elle reprend un savant mélange de cire, de peinture et de térébenthine. Cette technique est particulièrement importante dans les travaux de Mulasics László, puisqu’il en était considéré comme le maitre face à beaucoup d’artistes qui ont souvent échoué dans cet antique savoir-faire, longtemps disparu.
De sa première période ancrée dans les années 1980, que le public qualifie « d’archaïque » d’après l’utilisation de colonnes et formes géométriques, jusqu’à l’évolution de ses œuvres autour de collages photos, autoportraits fondus dans ses œuvres et l’utilisation permanente d’encaustique l’artiste partage avec nous son goût pour le jeu entre les matériaux et la superposition des couches. Une incitation au voyage qui nous fait aller le temps d’un instant à la rencontre d’une tribu africaine, pour, lorsque notre regard s’y pose, s’envoler ensuite vers des horizons mythologiques. L’artiste nous offre sa manière de voir, à travers son art d’observation, reproduisant un monde dans ses œuvres, jusqu’à sa mort en 2001, laissant au public pour dernières œuvres des pièces très colorées.
Mulasics László : un artiste majeur sur la scène hongroise et internationale
Si l’histoire de l’exposition amène chacun de nous à s’y rendre avant le 11 mars, celle de l’artiste, qui en est indissociable, n’en est pas moins passionnante. Mulasics László est, d’après Vanda Dilmann, très exposé dans la scène hongroise et internationale : il est présent dans le monde entier, de la France à Tokyo.
Ses œuvres s’inscrivent dans le mouvement de la « nouvelle sensibilité », résultant d’une volonté de créer un renouveau face au minimalisme très présent dans l’art contemporain du 20e siècle, notamment en Italie et en Allemagne, et ainsi signer un retour aux techniques de peinture, rendant visibles les gestes de l’artiste.
Depuis sa première exposition peu après sa disparition, Mulasics László a été de nombreuses fois mis à l’honneur par la galerie, à l’instar de sa grande rétrospective il y a deux ans.
Várfok et Hattat awards : l’histoire et les missions d’une galerie
Vanda Dilmann a eu le plaisir d’expliquer au Journal Francophone de Budapest l’histoire de cette galerie privée, divisée entre la grande galerie, dans laquelle l’exposition de Mulasics László a lieu, et la galerie 19, qualifiée de « project room ». Il s’agit véritablement d’une galerie qui en cache une autre, puisque cette dernière, ancienne place de la Várfok, accueille de jeunes artistes talentueux, émergeant sur la scène hongroise, alors que la principale se consacre à un cercle permanant de 23 artistes. Autour de la plus petite et plus ancienne des galeries, les passants ont le plaisir d’assister à un investissement de l’espace public par l’art, puisque la Várfok nous présente des affiches d’expositions autour des arbres de la rue.
Cette galerie privée ne reçoit aucun fonds du gouvernement et doit compter sur un financement privé axé en grande partie sur l’achat des œuvres, ce qui garantit une liberté totale dans les choix d’exposition. De nombreuses expositions ont fait la renommée de la galerie, notamment celle du parisien hongrois Endre Rozsda, ou encore la mise à l’honneur des œuvres de Francoise Gilot, peintre apprécié des galeries new-yorkaises et exposé actuellement par la galerie à l’occasion de la foire d’art moderne et contemporain de Karlsruhe.
Dans un contexte où l’art en Hongrie ne se limite qu’à un petit cercle de personnes intéressées, la Várfok a créé il y a deux ans un prix rendant hommage aux gens qui font beaucoup pour la galerie et pour l’art en général. Les premiers à le recevoir furent Jane et Lance Hattat, suivis d’un professeur d’Histoire de l’art dans un lycée de Budapest se rendant régulièrement à la galerie avec ses élèves. Cette année, le prix est revenu à une serrurière qui a beaucoup aidé la Várfok. Ainsi, cela permet aux acteurs généralement invisibles d’être respectés et reconnus.
Théo Cazedebat