« Aider les réfugiés, c’est une question d’humanité »

« Aider les réfugiés, c’est une question d’humanité »

Depuis le début de la crise migratoire, la population hongroise se mobilise et épaule les déplacés. Démontrant que l’opinion des compatriotes de Viktor Orbán ne peut être résumée à la position controversée du chef du gouvernement et de ses ministres. C’est le cas de nombreuses associations offrant soins médicaux, nourriture, vêtements et couvertures aux migrants dans le besoin à Keleti ainsi que dans les deux autres gares de Budapest (Déli et Nyugati).

Illustration avec Yann, jeune infirmier allemand volontaire au sein de l’ONG Medical Aid.

JFB : Pour quelles raisons as-tu décidé de venir ici, à Keleti ? Combien de temps penses-tu rester ?

Yann : J’étais en Hongrie au moment où la crise migratoire s’est amplifiée et j’avais du temps devant moi. Je voulais vraiment m’impliquer et j’ai lu sur Internet qu’il fallait une aide médicale et des personnes travaillant dans le domaine de la santé (comme des médecins, des pharmaciens ou des infirmiers). Je suis ici depuis déjà deux semaines et je dois rentrer chez moi ce mercredi. Mais aider était évident pour moi. C’est une question d’humanité.

JFB : Tu es volontaire pour Medical Aid. Peux-tu nous parler de l’association?

Yann : L’association dans laquelle je me suis engagé est une organisation médicale qui se bat pour aider les réfugiés. Nous sommes le même genre d’association que Migration Aid. Celle-ci accueille principalement des docteurs et des infirmiers hongrois. Néanmoins, il y aussi des étrangers par exemple des anglais. Medical Aid a été spécialement créée pour répondre à la crise migratoire et aider les réfugiés. Ce n’est pas une organisation internationale, c’est une structure hongroise qui regroupe surtout des volontaires locaux prêts à donner un coup de main.

JFB : Quel est ton rôle ici à Medical Aid ?

Yann : J’interviens comme infirmier. Je donne aux personnes qui viennent ici ce dont elles ont besoin, notamment des médicaments pour le rhume ou les maux de tête. J’effectue aussi différents types de soins médicaux dans la mesure de mes compétences. (Avant le début de l’interview, Yann s’est absenté cinq minutes pour aller examiner un patient avec son stéthoscope, ndlr).

JFB : Que penses-tu de la construction du mur à la frontière serbo-hongroise ?

Yann : Pour moi ça n’a pas beaucoup de sens. Les réfugiés peuvent passer au-dessus et en dessous. Je pense qu’il s’agit là uniquement d’un acte symbolique car ce mur ne peux pas empêcher de passer qui que ce soit. D’ailleurs nous avons des équipes dans le camp de Röszke à proximité de la clôture. Nous utilisons Keleti comme une sorte de centre à partir duquel nous pouvons nous déployer.

JFB : Et de la position du gouvernement hongrois, contre l’arrivée des réfugiés dans le pays ?

Yann : La position de Budapest est identique à celle des Britanniques, de l’Autriche ou des Tchèques. Il s’agit réellement d’une crise européenne et non d’un problème uniquement hongrois. Pour autant, je n’approuve pas la position du gouvernement Orbán. L’Europe doit tenter de changer les choses.

JFB : A ton avis quel doit être le rôle de l’Europe dans la gestion de cette crise ?

Yann : L’Europe doit être juste avec tous les pays. La situation est en effet très différente entre les pays du Sud et du Nord du continent. L’Angleterre, l’Allemagne et la France doivent être solidaires avec les pays aux frontières méridionales de l’Union. La gestion de cette crise doit être plus juste. Les pays du Nord ne peuvent pas dire qu’ils ne veulent pas des réfugiés et les renvoyer comme ça vers le Sud qui n’est pas plus enclin à les accueillir. Ce n’est pas ça aider les réfugiés.

JFB : Sur le mur de la station de métro on peut lire des messages comme « thanks a lot hungaria we will never forgot your kindness. You are so much good » (1). Que te disent souvent les réfugiés ?

Yann : Les réfugiés sont plein de reconnaissance. Ils nous parlent aussi de leur voyage depuis l’Irak, la Syrie ou encore l’Afghanistan et du fait qu’ils veulent juste vivre dans un endroit qui sera bon pour eux et où ils pourront avoir une vie meilleure. J’ai rencontré des professeurs d’université, des ingénieurs et pleins de personnes éduquées qui ont juste l’intention de repartir à zéro. Ils sont tous très curieux au sujet des pays où ils veulent aller. J’ai par exemple rencontré une famille qui voulait rejoindre des connaissances en France. Ils avaient une sorte de guide touristique à partir duquel ils apprenaient du vocabulaire et se renseignaient sur la culture. Ils étaient vraiment intéressés.

JFB : Quels genres de soutiens reçoit Medical Aid ?

Yann : Nous recevons de l’aide de la part de personnes privées, que ce soient des entreprises ou des individus qui nous donnent surtout des médicaments. Si vous souhaitez participer vous pouvez venir à Migration Aid ou même ici à Medical Aid si vous êtes médecin. Vous pouvez aussi apporter de la nourriture et des vêtements. Il y a de nombreuses façons de contribuer.

Elayïs Bandini

(1)« Merci beaucoup les hongrois. Nous n’oublierons jamais votre gentillesse. Vous êtes beaucoup trop bons ».

Photos : Elayïs Bandini

 

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