André Kertész ou le prisme de la poésie

André Kertész ou le prisme de la poésie

Expo

Rétrospective photographique

Depuis le 30 septembre et jusqu'au 31 décembre 2011, le Musée National Hongrois accueille une magnifique rétrospective du photographe André Kertész. Cette exposition est l'occasion de découvrir ce photographe né en Hongrie en 1894, qui fut ensuite naturalisé américain. Le travail d’André Kertesz a notamment permis de valoriser la photographie comme art à part entière dans les années 20.

 

 

Près de 300 clichés sont présentés, qui attestent de la richesse et de la qualité de cette exposition. Les commissaires de l'exposition ont choisi un affichage chronologique qui permet d'appréhender l'évolution du photographe mais qui, parfois, peut manquer de parti pris. Toutefois, la densité du travail d'André Kertész représenté ici nous donne la possibilité de plonger corps, esprit et âme dans son oeuvre.

Tout commence avec les photographies hongroises, prises avant la fin de la première guerre mondiale, et présentées en petites épreuves appréciables à travers une loupe fournie à l'accueil. Et dès ses premières photos, André Kertész est novateur, notamment à travers la série du nageur sous l'eau, qui hypnotise l'oeil.

Que l'on soit dans la salle parisienne ou new-yorkaise, il devient évident que les images de Kertész sont de vraies compositions, mêlant certainement un énorme travail en amont à la spontanéité et la fraîcheur des instants mis en boîte. Les proportions sont étudiées avec soin, presque calculées et Kertész a réussi tout au long de son oeuvre un formidable travail sur l'ombre. Je trouve également une tendre ironie dans certains clichés, comme cette photo d'un nuage égaré dans le ciel bleu new-yorkais ou celle d'un peintre peignant sur son ombre. André Kertész a su provoquer une poésie burlesque, visible dans nombre de ses clichés. Cette poésie, il allait la chercher dans ses sentiments, car pour lui, ses photos représentaient son ressenti et non ce qu'il voyait.

Sa série sur les distorsions est d'ailleurs emblématique de sa vision de l'art photographique. Il en résulte un travail sur la vision du corps humain. Cette galerie de photos pourrait s'apparenter à une galerie de freaks, l'aboutissement de ces déformations pouvant être perçu comme une désintégration du corps.

Il a aussi su s'intéresser aux techniques modernes, en réalisant une série de clichés pris au polaroïd, qui montrent là encore son sens de la composition.

Toutefois, malgré son oeil précurseur, André Kertész n'a jamais vraiment été reconnu en tant qu'artiste majeur lors de son vivant. D'autres ont été mieux célébrés que lui, tels Doisneau, Man Ray ou Brassaï qu'il a côtoyés.

Il est désormais temps d'apprécier cet artiste à sa juste valeur, celle d'un créateur avant-gardiste qu'il fut réellement.

Juliette Monroche

Musée National Hongrois, Múzeum krt 14-16 - 8ème arr. Ouvert tous les jours sauf le lundi, de 10h à 18h

 

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