La réhabilitation de Miklós Horthy

La réhabilitation de Miklós Horthy

Comment la droite au pouvoir normalise la figure de l’amiral allié d’Adolf Hitler

Depuis toujours, le Jobbik revendique sa filiation avec l’amiral Horthy, régent de la Hongrie de 1920 à 1944. Ce dernier est célébré par les partisans du Jobbik comme le seul homme d’Etat ayant tenté et réussi à récupérer certaines régions perdues par la Hongrie après la signature du Traité de Trianon en 1920. Ainsi est-il vu comme un défenseur de la grande nation hongroise, millénaire et fière d’elle. Cette politique territoriale fut cependant concrétisée par une collaboration, aux conséquences humaines désastreuses, avec l’Allemagne nazie, acceptant l’adoption de lois anti-juives et la déportation massive de populations.

 

 

Il semblerait que le Fidesz se soit lui aussi mis à jouer avec le passé controversé de Miklós Horthy, sans doute à des fins électoralistes. L’Ordre des preux, créé par Horthy pour décorer les héros de la première guerre mondiale, a organisé un bal dans la capitale afin de collecter des fonds en vue de l’édification d’une statue équestre de l’amiral à Budapest. Cet évènement était parrainé par plusieurs personnalités au gouvernement, dont le vice-premier ministre Zsolt Semjén et le secrétaire d’Etat au commerce Kristóf Szatmári. D’autres éléments permettent de confirmer ce soudain engouement pour la personne de Horthy. La ville de Gyömrô, près de Budapest, a donné le nom de Horthy à un parc municipal, faisant marche arrière sur la création d’une place en son honneur. La ville de Kereki, au sud du Balaton, a inauguré une statue du régent en présence d’hommes d’Eglise, de Motards Goys (association d’extrême-droite) ainsi que de membres de l’Ordre des preux.  A ce sujet, le Premier ministre s’est contenté d’évoquer une simple liberté d’action des collectivités territoriales.

Par ailleurs, le projet architectural de la place Kossuth à Budapest va en ce sens. Des clichés datant de la période Horthy y sont exposés dans le but d’annoncer les travaux qui s’y préparent. En effet, un vaste chantier sera mis en œuvre pour que la place située derrière le Parlement retrouve son aspect d’avant 1940. Cela a déjà entrainé le déplacement de la statue du comte Mihály Károlyi, président de la première République hongroise après la chute de l’Empire austro-hongrois et accusé par une certaine partie de la droite d’avoir facilité l’avènement de l’éphémère République des Conseils, ce qui lui vaut le surnom de « comte rouge », et laisse fort à penser, comme l’ont déjà annoncé certains députés, que la statue de József Attila, illustre poète communiste, fera aussi les frais de cette rénovation aux accents nostalgiques.

Suivant cette logique, l’auteur József Nyirô vient d’être inscrit au programme scolaire pour la rentrée.  Adorateur de Goebbels, fidèle partisan des Croix fléchées de Szálasi et antisémite confirmé, il finit ses jours en Espagne. Sa dépouille a été rapatriée par le gouvernement afin de lui célébrer des funérailles dans sa ville natale en Roumanie, ce qui n’a pas été sans susciter des réticences de la part des autorités roumaines. László Kövér, Président du Parlement, avait pour projet d’engager des hussards à cheval pour escorter l’urne jusqu’en Roumanie, urne qui s’est révélée être vide après un contrôle de la police Roumaine. Une simple commémoration a donc eu lieu en présence de M. Kövér qui s’est empressée de déclarer que l’attitude des Roumains avait été « primitive, paranoïaque et barbare ». 

Yann CASPAR

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