De la décentralisation à la rationalisation?

De la décentralisation à la rationalisation?

Un regard sur les quartiers périphériques de Budapest

 

Si les Français ont, en général, une vision très négative sur les banlieues, il n’en va pas exactement de même pour les Hongrois. «Délinquance», «violence», «insécurité», «chômage» et «immigration» sont les mots qui ressortent de l’évocation de la banlieue parisienne, en particulier quand on pense aux émeutes de 2005, commencées à Clichy-sous-Bois, ou encore au documentaire-fiction Entre les murs de François Bégaudeau qui lui a valu la palme d’or à Cannes. En France, la banlieue a souvent une connotation péjorative et est souvent associée à des quartiers sensibles et défavorisés.

Les quartiers à la périphérie de Budapest offrent quant à eux une image des plus complexes. Les IIe, XIIe et une partie du IIIe arrondissements situés du côté Buda comptent parmi les quartiers dits d’élites, des zones résidentielles habitées par les couches supérieures de la société. Ce ne sont que les membres des classes moyennes aisées et riches qui peuvent se permettre d’y habiter car le prix des villas luxueuses, dont l’équipement indispensable comprend la piscine, le sauna, le jacuzzi et la salle de fitness, dépasse fréquemment les 200 millions de HUF. Ces arrondissements périphériques se situent au-dessus de la moyenne nationale non seulement en ce qui concerne le prix des maisons et le revenu de ses habitants mais aussi le niveau d’éducation. Le IIe remporte la palme haut la main avec environ 50 % de diplômés au sein de sa population. En outre, de plus en plus d’intellectuels choisissent comme lieu de résidence l’agglomération budapestoise, notamment Telki et Nagykovácsi ainsi que le pôle universitaire de Gödöllô.

Les quartiers défavorisés ne manquent pas à Budapest non plus. Côté Pest, les quartiers périphériques ne présentent pas l’image idyllique de l’autre bord du Danube. Les XVe, XVIe, XVIIe et XVIIIe arrondissements sont surtout dominés par des vestiges d’anciennes zones industrielles ainsi que par leurs “HLM” construits dès les années 1950-60. Ces immeubles sont, dans la plupart des cas, dans un état de délabrement avancé mais, grâce aux multiples tentatives de réhabilitation, dont le programme «Panel Plusz», la modernisation de ces quartiers est désormais entamée. Ils commencent en outre à devenir attirant, en particulier à cause des prix de locations raisonnables qui y sont pratiqués. Le VIIIe arrondissement, en plein milieu de Pest, connu sous le nom de Józsefváros, a longtemps été l’un des quartiers les plus sensibles de la ville. Toutefois, au cours des dix dernières années, une véritable politique de réhabilitation et de développement a été mise en œuvre, grâce à laquelle une partie du quartier a déjà été rénovée.

Mais une autre question très actuelle se pose à propos de ces quartiers : jusqu’à quand pourra-t-on parler des 23 arrondissements de Budapest?

Certains arrondissements vont-ils disparaître ?

«Le fonctionnement de l’administration publique de Budapest est devenu impossible» a déclaré István Tarlós dans une interview publiée dans le quotidien Magyar Hírlap, ajoutant qu’une réforme municipale s’avérait aujourd’hui nécessaire. Le président de la fraction du Fidesz, en collaboration avec Lajos Kósa, le maire de la ville de Debrecen, a formulé quelques propositions de loi dans ce sens. L’une des idées avancées consiste à maintenir tels quels les 23 arrondissements, mais à transférer à la capitale de nombreux pouvoirs jusqu’ici détenus par les mairies d’arrondissements. Le deuxième scénario comprend la formation de 7 ou 8 arrondissements, dont 3 à Buda. La troisième version formule l’idée de fusion des arrondissements intérieurs : le Ier, une partie du IIe, les Ve, VIe, VIIe, VIIIe, IXe et une partie du XIIIe constitueraient la capitale. Les IIIe, IVe et XIe garderaient leur autonomie tandis que les autres arrondissements seraient réorganisés en 4 ou 5 nouveaux ensembles. István Tarlós a également évoqué une quatrième alternative, notamment la suppression des 23 arrondissements qui seraient représentés par des députés dans l’assemblée générale de la capitale.

«Je suis très heureux que le Fidesz ait changé d’avis dans cette question» a déclaré Gábor Demszky, maire de Budapest, réagissant à des propositions qui, selon lui, avaient déjà été formulées par le SZDSZ il y a quelques années. Le dirigeant de Budapest a reconnu qu’au début des années 1990, la création d’une capitale excessivement décentralisée avait été une erreur. Aujourd’hui, pour pouvoir modifier la loi sur la municipalité, la décision doit être prise à la majorité des 2/3, ainsi les forces politiques doivent-elles enfin parvenir à un consensus. «Grâce au changement d’attitude du Fidesz, on a une réelle chance d’y arriver» a expliqué Demszky, qui opte pour le renforcement de la municipalité de la capitale.

Les chances sont d’autant plus grandes que Pál Steiner, dirigeant de la fraction budapestoise des socialistes a confirmé l’ouverture du MSZP à la réforme du système municipal de la capitale. A partir de 2010 Budapest pourrait fonctionner selon le nouveau système.

Un système municipal tel que celui de Budapest fonctionnait à Varsovie juste après le changement de régime. Des réformes ont toutefois été entreprises sans tarder, ce système ayant été reconnu comme un facteur aggravant de certains problèmes. A Budapest cette réforme se fait attendre depuis une quinzaine d’années. Mais mieux vaut tard que jamais...


 

Máté Kovács

 

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